À l’occasion des 350 ans de l’Opéra de Paris, le musée d’Orsay propose, du mardi 24 septembre au dimanche 19 janvier, une exposition qui présente au public plus de 200 œuvres qu’Edgar Degas consacra à l’Opéra, l’obsession de sa vie d’artiste.
Degas à l’Opéra mais peintre d’atelier
Habitué de l’Opéra de Paris, notamment de la Salle Peletier qu’il adorait et qui a brûlé puis du Palais Garnier qu’il détestait, Edgar n’a jamais peint et presque jamais dessiné in situ des ballerines et des scènes de danse. Ses pastels des petits rats de l’Opéra en répétition semblent plus vrais que nature. Mais Edgar Degas a le plus souvent inventé ces scènes, après avoir fait poser les ballerines pendant de longues heures dans son propre studio. « J’en ai tant fait de ces examens de danse, sans les avoir vus, que j’en suis un peu honteux » reconnaît-il dans une lettre en 1880, en référence aux redoutables concours de promotion des danseurs encore en vigueur au ballet de l’Opéra de Paris. Mais « même si ces peintures n’ont pas été réalisées dans une salle de répétition, c’est comme si on y était. C’était un observateur extraordinaire (…) il a fait plusieurs études de pieds tout en regardant comment elles se positionnaient en première ou seconde position. » explique Kimberly Jones, conservatrice à la National Gallery of Art de Washington qui a prêté une vingtaine de tableaux. Si ses premiers tableaux de ballet dans les années 1870 rencontrent le succès, le flou demeure sur la fréquence de ses visites dans les salles de répétition et des coulisses pendant cette période, vu qu’il n’est devenu que tardivement, en 1885, un abonné de l’Opéra, statut privilégié donnant un accès aux coulisses.

Edgar Degas peint la vie de l’Opéra
Imprégné, voire obsédé, de danse et d’opéra, Edgar Degas, dans ses œuvres, va au-delà du travail des ballerines sur scène ou en répétition, avec des toiles et dessins qui montrent également des compositeurs, des musiciens, des choristes, les coulisses, les loges, le public… C’est toute la vie de l’Opéra qu’il décrit. Même les abonnés, ces messieurs habillés en noir, présents en coulisses, au foyer, tout près des danseuses en tutus blanc. Des ballerines dont ils espéraient devenir les protecteurs, malheureusement souvent avec des arrière-pensées peu honorables. « Il les montre avec leurs prédateurs. Il n’était pas complice, mais il ne les dénonçait pas non plus » précise Marine Kisiel, conservatrice au musée d’Orsay. Les experts s’accordent pour dire que Degas était respectueux des danseuses et de leur dure carrière. Réputé misogyne, il a toutefois, selon Marine Kisiel : « aidé des peintres femmes à émerger comme Berthe Morisot ». D’après Kimberly Jones, il était surtout un « misanthrope, quelqu’un de très timide et réservé ».
Parallèlement à l’exposition, le 11 et 12 octobre, sera proposée, au Musée d’Orsay au milieu des œuvres, une création chorégraphique, conçue par le danseur Nicolas Paul et Aurélie Dupont, directrice de la danse du ballet de l’Opéra. Le 9 décembre, l’orchestre de l’Opéra présentera un concert associant Debussy et Prokofiev sous la nef du Musée d’Orsay, sous la direction de Philippe Jordan. Enfin le 16 janvier, à quelques jours de la clôture de l’exposition, les visiteurs du musée seront conviés, de 18h30 à 23h, à un bal masqué géant dans la tradition de ceux de l’Opéra.
À noter que cette exposition débute le jour même où l’Opéra Garnier sera fermé en raison d’un mouvement de grève lié à la réforme des retraites l’obligeant à annuler la représentation de La Traviata.
Philippe Gault (avec AFP)