Comment fonctionne NomadPlay, l’application qui a séduit Renaud Capuçon ?

L’application française NomadPlay propose aux musiciens de jouer accompagnés d’un ensemble ou d’un orchestre, dépourvu du son de l’instrument qu’ils pratiquent. C’est grâce à l’intelligence artificielle qu’elle offre à ses utilisateurs une telle immersion musicale.

NomadPlay peut faire disparaître l’instrument d’un orchestre

« Décloisonner la musique classique ». Clothilde Chalot affiche son objectif. Ingénieure et co-fondatrice de la start-up Digital Music Solutions, voilà quinze ans qu’elle évolue dans le milieu de la musique. Passée par l’industrie du spectacle vivant, elle a fait ses classes à l’Opéra de Rouen avant de travailler pour celui de Paris. Une carrière, qui lui a permis de « côtoyer des publics différents » avant de se lancer dans le business du numérique. « En me penchant sur le digital, j’ai vu qu’il n’y avait pas forcément d’offre accessible » dans la musique classique.

 

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En avril 2019, elle lance alors la première version de son application NomadPlay, développée conjointement avec la violoniste Hannelore Guittet. « L’appli s’adresse à des musiciens, puisque l’idée est de pratiquer un instrument avec des professionnels ». De nombreux instrumentistes s’entraînent quotidiennement en étant accompagnés de l’enregistrement live ou studio d’un ensemble ou d’un orchestre. Outre des partitions, l’application leur propose de télécharger un morceau et de supprimer de la piste l’instrument de leur choix. Ainsi, ils peuvent jouer en immersion, à la place de l’un des musiciens à l’écoute. 

 

Renaud Capuçon, séduit, est entré au capital de NomadPlay

L’axe a été mis sur la visibilité des interprètes, trop souvent ignorés ou méconnus aux yeux de Clothilde Chalot. Les 550 œuvres du catalogue, qui devrait tripler d’ici la fin de l’année, sont rangées selon le compositeur, l’artiste, l’instrument ou encore le niveau de difficulté. « Du débutant jusqu’aux plus grands professionnels », NomadPlay cherche à s’adresser à tous les publics et multiplie les œuvres pédagogiques ; « une demande qui provient des conservatoires ». Plusieurs musiciens, comme le tromboniste Fabrice Millischer ou encore le trompettiste Romain Leleu, prêtent leur talent à l’enregistrement de ces productions à l’adresse des instrumentistes en perfectionnement.

 

 

A présent, même un débutant peut virtuellement « intégrer l’Orchestre national d’Île-de-France, le philharmonique de Strasbourg ou jouer avec Renaud Capuçon. » Le célèbre violoniste est le véritable porte-étendard de l’application. A l’occasion d’une rencontre avec Clothilde Chalot, il teste l’application et, emballé, décide d’investir dans le capital de la start-up. « Le cas de Renaud Capuçon, seul artiste associé à l’application, est exceptionnel », mais permet à la société d’accroître sa crédibilité sur le marché.

 

Un algorithme d’intelligence artificielle resté des années secret

« La bibliothèque d’œuvres s’est construite en plusieurs étapes. Au début, on a sollicité les artistes que l’on connaissait bien ». Car Clothilde Chalot a aussi créé un label, NoMadMusic, et collabore régulièrement avec Célimène Daudet, le Quatuor Zaïde ou encore l’Orchestre national d’Ile-de-France. « Beaucoup d’artistes nous demandent à participer et sont intéressés par l’aspect pédagogique ». Une manière aussi pour eux de se faire valoir auprès d’un nouveau public, plutôt constitué de trentenaires, mais aussi à l’international. « La musique classique est étudiée dans beaucoup de pays, aux Etats-Unis, en Asie, en Europe. Ce sont les marchés que l’on cible. » La start-up peut y vanter son algorithme, développé en interne, et longtemps tenu secret à l’abri des concurrents.

 

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« L’algorithme fait appel à de l’intelligence artificielle et peut séparer tous les instruments de l’enregistrement » d’un ensemble ou d’un orchestre. Sollicitée l’an dernier par le festival de Pâques d’Aix-en-Provence, l’entreprise gagne progressivement en notoriété mais n’est toujours pas rentable pour l’heure. Si les œuvres sont téléchargeables à l’unité, pour un tarif compris entre 2€ et 20€, un abonnement mensuel est aussi proposé. L’offre de lancement à 9,90€ est disponible jusqu’à la fin du mois d’avril. Au-delà de cette échéance, la start-up, qui tâtonne encore sur sa tarification, ne peut encore prédire son montant.

 

Nicolas Gomont

 

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