Confinement : le gouvernement ne doit pas « permettre d’imposer les jours de congés »

Laurent Berger était l’invité de la matinale de Renaud Blanc ce mardi 24 mars. Le secrétaire général de la CFDT ne s’est pas opposé à « la nationalisation » d’entreprises en difficulté mais a réprouvé les propos de Gérald Darmanin, qui voudrait que les salariés transforment leurs jours de confinement en congés payés. « Ce n’est pas à un ministre de le décréter ».

Laurent Berger réclame la création d’un « comité scientifique en sciences sociales »

« Il y a une forme d’ambiguïté. Hier, j’avoue que sur la question du sport, je n’ai pas forcément compris les choses ». Au lendemain de l’allocution du Premier ministre, censée éclaircir les conditions du confinement et annoncer un renforcement des mesures de coercition pour les contrevenants, Laurent Berger regrette l’absence de directives strictes sur certains points. « Sur l’activité sportive, c’est important, il ne faut pas donner le sentiment que l’on peut continuer comme avant. Tous ceux qui n’ont pas de nécessités à sortir, il faut qu’ils restent chez eux, point barre », s’est-il emporté.

 

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« Il faut un confinement intelligent et donc, il faut que l’on comprenne les mesures. C’est pour tous ceux qui se battent au quotidien, pour sauver des vies. » Le secrétaire général de la CFDT dit s’inquiéter pour « les invisibles », « ces travailleurs que certains ne considéraient pas comme importants et qui sont désormais indispensables » à leurs yeux. Il a aussi évoqué ces occupants, désormais confinés, de logements si petits qu’ils en deviennent invivables. Laurent Berger réclame, pour leur venir en aide, la création avant la fin de la crise « d’un comité scientifique en sciences sociales », pour « que l’on monte en puissance sur l’enjeu sociétal, sans minorer la question de la santé ».

 

 

Les banques, l’édition ou Amazon ne protègent pas assez leurs salariés pour Laurent Berger

Se refusant à faire « une liste à la Prévert des activités essentielles » au pays, le chef du syndicat dit « réformiste » a préféré égrainer les secteurs qui ne protégeraient pas leurs salariés contre l’épidémie de coronavirus. « Les banques refusent un dialogue avec les fédérations syndicales pour voir comment on adapte le secteur bancaire à la situation, a-t-il fustigé. Autre exemple, Amazon, qui refuse d’une certaine manière d’adapter sa production pour que les salariés soient sécurisés ».

 

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Il a également pointé du doigt le milieu de l’édition et de la restauration rapide, où il y aurait « des tensions ». « Je crois qu’il ne faut pas faire dans la nuance. Si les entreprises, sciemment, ne donnent pas de conditions de sécurité absolues, il faut pouvoir les condamner », a-t-il tranché, réclamant comme les « huit centrales syndicales et patronales » de « réunir les comités sociaux économiques et les délégués du personnel » pour prévoir les mesures sanitaires à prendre entreprise par entreprise.

 

 

« Ce n’est pas à un ministre de décréter » si les salariés doivent prendre des jours de congés

C’est aussi par le « dialogue social » que Laurent Berger souhaite que l’organisation du travail se définisse durant la crise sanitaire. « On vient d’expliquer qu’il y avait des gens qui sont entre la vie et la mort et on se pose des questions de savoir si on doit prendre quelques jours de congés payés », déclarait hier au micro de Radio Classique le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, appelant les salariés à faire des efforts pour limiter l’impact économique de la pandémie.

 

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« Ce n’est pas à un ministre de le décréter, a critiqué le patron de la CFDT. On a dit au gouvernement de ne pas permettre d’imposer unilatéralement la prise de jours de congés pendant cette période ». Il a ensuite réitéré son appel au dialogue social, pour éviter d’en sortir par « un peu plus de nationalisme », ce qui serait « la catastrophe ».

 

 

Laurent Berger favorable, comme le président du MEDEF, à des nationalisations

Pour autant, il n’appelle pas à l’union sacrée dans son propre camp, entre les centrales syndicales. « Non. Je souhaite que l’on fasse face le mieux possible à la crise économique et sociale qui se profile, et qui est déjà là d’une certaine manière. » Les conséquences économiques déjà prévisibles de cet épisode de confinement font craindre des pertes désastreuses pour certaines entreprises, pouvant se retrouver à la merci d’un rachat étranger.

 

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La nationalisation de certains fleurons français est sur la table du gouvernement et est même avancée par Geoffroy Roux de Bézieux, le président du MEDEF. « Bien sûr, il faudra le faire pour éviter (qu’ils) puissent être rachetés pour quelques dollars par un fond de pension », a jugé Laurent Berger, qui veut « faire évoluer certains points de vue du monde d’avant ». « Les nationalisations rentrent dans ce cadre », a-t-il conclu.

 

Nicolas Gomont

 

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