Après la présidentielle et les législatives, les partis ont déjà tous le regard tourné vers le prochain rendez-vous électoral : les élections européennes de 2024. Si les électeurs vont pouvoir souffler ces prochains mois après le marathon de 2022, tous les mouvements sont d’ores et déjà en train de préparer cette échéance politique.
Les partis avaient l’habitude de recaser au parlement européen les élus battus dans les autres scrutins
Souvent considéré comme secondaire, le scrutin des européennes ne passionne pas les Français : la moitié d’entre eux s’étaient abstenus lors de la dernière élection de 2019. Mais à quasi-mi-mandat, les européennes font figure de test politique pour les partis. Pendant longtemps, ils n’y accordaient que peu d’importance, recasant à Strasbourg les élus battus dans les autres scrutins. Mais tous comprennent désormais l’intérêt de disposer au parlement européen de relais solides. C’est là que les initiatives législatives sont prises, en lien avec le Conseil de l’Union européenne, et les 705 eurodéputés disposent d’un pouvoir de contrôle de la Commission. La crise du Covid et la guerre en Ukraine ont montré que les décisions essentielles, en matière de budget, de santé, d’environnement ou d’énergie, étaient prises à Bruxelles.
A lire aussi
Si les enjeux se jouent à l’échelle des 27, les stratégies politiques pour les européennes sont, elles, bien nationales. Il suffit de se souvenir des européennes de 2019 pour comprendre qu’elles étaient une sorte de répétition générale de la présidentielle de 2022. Macronistes et Rassemblement national s’étaient choisis comme adversaires privilégiés, en réactivant le clivage entre mondialistes et souverainistes. Une grille de lecture du paysage politique qui a remplacé ces cinq dernières années le traditionnel axe droite-gauche. Les Républicains étaient d’ailleurs sortis largement affaiblis de ce scrutin, la liste emmenée par François-Xavier Bellamy ne récoltant que 8,5% des suffrages. Cette déroute avait provoqué la démission de Laurent Wauquiez de la présidence du parti. D’où l’importance pour la droite de bien préparer l’échéance de 2024 : en attendant la clarification qui suivra la désignation en novembre du nouveau patron des Républicains, l’ancien commissaire européen et candidat à la primaire Michel Barnier est déjà sur les rangs pour mener la liste, avec un défi de taille : retrouver une ligne rassembleuse au sein du parti et suffisamment audible entre Emmanuel Macron et Marine le Pen pour renverser le rapport de force.
L’union à gauche est loin d’être acquise en vue des européennes
A gauche aussi, les tractations sont lancées autour d’une question centrale : union ou pas ? Le débat a été lancé cet été par La France insoumise, qui veut reproduire aux européennes l’alliance de la Nupes nouée pour les législatives. Plus facile à dire qu’à faire tant les réticences sont nombreuses chez les partenaires de Jean-Luc Mélenchon. Les écologistes d’abord, qui ont fait des européennes leur élection de prédilection, et n’entendent pas abandonner cet avantage comparatif aux Insoumis. Les socialistes eux aussi sont divisés : si certains membres de la direction ne ferment pas la porte à une alliance, plusieurs ténors rappellent les divergences majeures avec les mélenchonistes sur l’Europe, nées du référendum de 2005 sur la constitution européenne. Aujourd’hui, le débat s’est déplacé sur la question centrale de savoir si la France peut déroger ou non aux traités européens. Les Insoumis sont pour, les socialistes contre. Autant dire que l’union à gauche est loin d’être acquise…
Jim Jarrasse