Anne-Sophie Mutter a débuté sa carrière de violoniste dès l’âge de 13 ans, révélée par Karajan. La sûreté de sa technique et son sens musical lui ont permis d’interpréter tous les chefs-d’œuvre romantiques, mais aussi la musique contemporaine qu’elle soutient activement. Son impressionnante discographie ne doit pas faire oublier son engagement auprès de nombreuses causes caritatives. Sa fondation permet en outre d’aider de jeunes musiciens à démarrer leur vie professionnelle.
Anne-Sophie Mutter en 8 dates :
- 1963 : Naissance à Rheinfelden (Bade, Allemagne)
- 1977 : Karajan l’engage comme soliste pour jouer avec le Philharmonique de Berlin
Fait ses débuts à Salzbourg - 1978 : Premier disque chez Deutsche Grammophon, avec le Philharmonique de Berlin (Concertos n°3 et 5 de Mozart)
- 1998 : Intégrale des Sonates de Mozart avec Lambert Orkis
- 2002 : Crée Sur le même accord d’Henri Dutilleux
Epouse en deuxièmes noces le chef d’orchestre André Prévin (dont elle divorce en 2006) - 2008 : Crée la « Anne-Sophie Mutter Foundation », prolongement des « Amis d’Anne-Sophie Mutter » amorcés en 1997.
- 2011 : Crée les Mutter’s Virtuosi, ensemble de jeunes musiciens lauréats de sa fondation
- 2021 : Crée au Festival de Tanglewood le Concerto n°2 de John Williams, sous la direction du compositeur
Devient présidente de « l’Aide allemande contre le cancer »
En devenant violoniste, Anne-Sophie Mutter a réalisé son rêve d’enfant
Anne-Sophie Mutter est la dernière de sa fratrie, après des grands frères. L’un d’eux, Andreas, sera aussi violoniste. Elle commence le violon à 5 ans, et étudie avec deux élèves de Carl Flesch, d’abord en Allemagne avec Erna Honigberger puis, à la mort de sa professeure en 1974, avec Aïda Stucki au Conservatoire de Winterthur en Suisse. « J’ai voulu être musicienne dès l’âge de six ans », rappelle Anne-Sophie Mutter à Classica en 2016. En 1970, elle gagne déjà le Concours fédéral Jugend Musiziert en violon, qu’elle remporte à nouveau en 1974. Elle joue aussi du piano, qu’elle a débuté juste avant le violon, et qui lui a valu un 1er Prix de piano à 4 mains avec son frère Christoph au Jugend Musiziert de 1970.
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Karajan la révèle au public à l’âge de 13 ans, et lui ouvre une carrière internationale
Karajan la remarque à 13 ans et la fait jouer en soliste avec l’Orchestre philharmonique de Berlin. Elle enregistre avec lui les concertos de Mozart, Beethoven, Brahms, Bruch, Tchaïkovsky et Mendelssohn, ainsi que le Double de Brahms en compagnie de Yo-Yo Ma. Sa carrière prend tout de suite un essor international, et en 1980 elle se rend à New York pour jouer avec le Philharmonique sous la baguette de Zubin Mehta. Son premier récital à Carnegie Hall a lieu trois ans plus tard, lors d’une tournée aux Etats-Unis et au Canada. Elle fait aussi ses débuts à Tokyo (1981) et à Moscou (1985). Elle joue sous la direction de Daniel Barenboim, Christoph von Dohnanyi, Wolfgang Sawallish, ou encore Mstislav Rostropovitch avec lequel elle se produit par ailleurs en trio dès 1985 en compagnie du pianiste Bruno Giuranna. A partir de 1988, elle forme également un duo avec le pianiste Lambert Orkis. Ensemble, ils enregistrent l’intégrale des sonates de Beethoven, Schubert, Mozart et Brahms.
En 2002, elle se remarie avec le chef et pianiste André Prévin, mais le couple se sépare quatre ans plus tard. Leur collaboration artistique perdure néanmoins jusqu’à la mort du chef d’orchestre en 2019. Ils laissent au disque différents concertos, dont ceux de Sibelius, Tchaïkovsky, Korngold, et Prévin lui-même – une œuvre intitulée « Anne-Sophie », que le chef lui avait offert en cadeau de fiançailles.
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La musique contemporaine est essentielle au sein de son répertoire
Le style d’Anne-Sophie Mutter est toujours très romantique, avec beaucoup de vibrato. Ce qui ne l’empêche pas de jouer Bach, ou les 4 Saisons de Vivaldi qu’elle a enregistrées plusieurs fois, dont deux avec Karajan. Son impressionnante discographie – plus de 40 albums ! – compte aussi les concertos de Berg, Stravinsky, le Deuxième de Bartok, ou encore les musiques de film de John Williams. Le répertoire d’Anne-Sophie Mutter s’étend jusqu’à la musique contemporaine, qu’elle défend activement. Elle a ainsi commandé près d’une trentaine d’œuvres, dont elle est la dédicataire. Elle a notamment créé Chain 2 de Lutoslawski en 1986, Sur le même accord de Dutilleux en 2002, et In Tempus praessens de Sofia Gubaïdulina en 2007, ainsi que des oeuvres de Krysztof Penderecki (Concerto n°2 « Metomorphosen » en 1995, la 2ème Sonate pour violon et piano en 2000, Duo concertante pour violon et contrebasse en 2011, et La Follia pour violon seul en 2013) et de Wolfgang Rihm (Gesungene Zeit en 1992, Lichtes Spiel en 2009 et Dyade pour violon et contrebasse en 2011).
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La violoniste met volontiers sa notoriété au service de causes caritatives
« La musique est là pour faire du bien à tous, sans distinction. C’est pourquoi j’ai toujours participé à des concerts au bénéfice de causes diverses, » commente-t-elle à Classica. Elle a ainsi souvent joué pour la Fondation Dinu Lipatti contre la leucémie à Genève, et a été marraine de l’association « SOS Village d’enfants » qui œuvre pour que les fratries d’orphelins puissent grandir ensemble. Elle devient en 2021 la présidente pour cinq ans de l’Aide allemande contre le cancer, et insiste sur l’importance de l’accompagnement psychologique des patients et de leur famille. Cette cause lui tient particulièrement à coeur, elle qui a perdu en 1995 son premier mari d’un cancer du poumon, l’avocat Detlef Wunderlich qu’elle avait épousé en 1989 et dont elle a eu deux enfants.
Anne-Sophie Mutter et Lambert Orkis au Théâtre des Champs Elysées, dans la Sonate n°9 « Kreutzer » de Beethoven
Anne-Sophie Mutter veut aider la génération suivante à intégrer le monde musical professionnel
En 1987, Anne-Sophie Mutter participe à la création du Rudolf Eberle Trust pour aider de jeunes instrumentistes à cordes en Europe. Elle développe ensuite sa propre fondation à la fin des années 90, pour des jeunes de 14 à 26 ans, avec cette fois une portée géographique mondiale. Daniel Müller-Schott, Sergey Khachatryan, ou encore Kian Soltani ont bénéficié en leur temps de ce soutien. Anne-Sophie Mutter ajoute en 2011 un ensemble à son nom, les Mutter’s Virtuosi, qui rassemble anciens et actuels boursiers de la fondation, dans le but de « les familiariser avec la vie de musicien professionnel et de les faire découvrir à un public plus large ». La violoniste invite parfois d’autres musiciens à se joindre à eux, comme le pianiste Daniil Trifonov avec lequel ils enregistrent La Truite de Schubert en 2017. Les concerts caritatifs sont au programme de chaque tournée. « Il est important pour moi que nos étudiants boursiers prennent conscience de leur responsabilité sociale en tant qu’artistes », indique la violoniste sur son site officiel. Un état d’esprit que résume la phrase confiée à Classica en 2016 : « Seul, on ne fait pas grand-chose. A plusieurs, on va plus loin. »
Sixtine de Gournay
Photo d’Anne-Sophie Mutter : Crédits DG / Harald Hoffmann