KAUFMANN Jonas – biographie

(1969- ) Ténor

Jonas Kaufmann chante en ténor, mais avec un timbre sombre proche d’un baryton. Cette originalité, couplée à une musicalité très fine et un très bon jeu d’acteur, lui vaut les louanges du monde entier. La star du lyrique, au physique de latin lover, interprète aussi bien Verdi et Puccini que Massenet ou Wagner, et s’autorise des échappées dans le répertoire du lied.

Jonas Kaufmann en 8 dates :

  • 1969 : Naissance à Munich
  • 1994 : Entre dans la troupe du Théâtre de Sarrebrück
  • 1999 : Débuts au Festival de Salzbourg et à la Scala de Milan
  • 2001 : Débuts à l’Opéra de Zurich
  • 2006 : Débuts au Met de New York dans La Traviata avec Angela Gheorghiu
  • 2008 : Premier récital discographique chez Decca
  • 2010 : débuts à Bayreuth dans Lohengrin
  • 2013 : signe un contrat chez Sony

Le ténor commence sa carrière dans la troupe de Sarrebrück

Jonas Kaufmann grandit à Munich, dans une famille férue de littérature, de théâtre et de musique. A 6 ans, on l’emmène voir Madame Butterfly. Enfant, Jonas rêve d’être archéologue, mais s’oriente finalement vers la musique après un bref détour par les mathématiques. A la Hochschule für Musik de Munich, il interprète Tamino dans une version de concert de La Flûte enchantée dirigée par Colin Davis. C’est dans ce rôle qu’il fait ses débuts au Prinzregententheater de Munich en 1994, sans pour autant cesser les cours avec Michael Rhodes, après s’être perfectionné avec Hans Hotter, James King et Josef Metternich.

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Il entre dans la troupe de Sarrebrück et y passe deux années formatrices. « Ma carrière a commencé lentement, par de petits rôles, dans de petits théâtres. […] Je connais le métier, le chemin, les risques, » rappelle-t-il en 2015 à Classica. Kaufmann chante sur les principales scènes allemandes, puis dès 1999 on l’entend à Salzbourg dans Doktor Faust de Busoni, à la Scala de Milan et très vite à l’Opéra de Chicago. L’originalité de son timbre sombre, proche d’un baryton, séduit le public et l’aide à s’imposer au milieu de la rude concurrence lyrique.

 

Londres, Paris, Zurich et Munich font partie de ses villes préférées

Jonas Kaufmann entre à l’Opéra de Zurich en 2002. On l’y entend dans Mozart (Idoménée, La Flûte enchantée et La Clémence de Titus), Verdi (Falstaff et Rigoletto en 2005, Don Carlos en 2007) les romantiques français (Carmen de Bizet, Faust de Gounod, Mignon d’Ambroise Thomas), mais aussi Le Couronnement de Poppée de Monteverdi et Fidelio de Beethoven. C’est aussi à Zurich qu’il aborde son premier grand rôle wagnérien en 2006 dans Parsifal, alors que la plupart des ténors commencent par Lohengrin. Très attaché à Zurich, Jonas Kaufmann s’y installe avec son épouse – la mezzo-soprano Margarete Joswig, dont il se sépare en 2014 – pour élever leurs trois enfants.

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Le ténor est aussi très assidu au Met de New York et au Covent Garden de Londres (Carmen en 2007, la version en 5 actes de Don Carlo en 2009, Adrienne Lecouvreur en 2010 avec Angela Gheorghiu dans la mise en scène de David McVicar, Manon Lescaut en 2014, Andréa Chénier en 2015, ou encore Otello en 2017). Il n’oublie pas sa ville natale, à qui il offre plusieurs prises de rôles au Bayerische Staatsoper : Lohengrin en 2009, Le Trouvère et La Force du destin en 2013 (ce dernier avec Anja Harteros et Ludovic Tézier, sorti en DVD chez Decca), Aïda en 2015, et Les Maîtres chanteurs en 2016. L’Opéra de Paris n’est pas en reste : Cassio d’Otello en 2004, Alfredo de La Traviata en 2007 et Florestan de Fidelio en 2008, puis La Damnation de Faust, Lohengrin (reprise de la mise en scène de Klaus Guth pour La Scala en 2012), et Don Carlos (en français), même si le ténor doit malheureusement annuler sa présence aux Contes d’Hoffmann en 2016 à cause d’un hématome sur une corde vocale. A Paris, il assouvit en même temps une autre passion musicale : les récitals de lieder.

 

En marge de l’opéra, il enregistre des lieder et de l’opérette viennoise

Le pianiste Helmut Deutsch le suit dans l’aventure du lied, au concert et en disque. Ils enregistrent La Belle meunière (2010) et Le Voyage d’hiver (2014) de Schubert, des lieder de Schumann, Brahms et Mozart (2020), et Liszt (2021). Kaufmann a par ailleurs gravé Le Chant de la Terre de Mahler en 2017 avec Le Philharmonique de Vienne sous la direction de Jonathan Nott. Il convainc Sony de faire un disque d’opérettes allemandes et viennoises avec l’Orchestre de la Radio de Berlin (« Du bist die Welt für mich » en 2014). Devant le succès de l’album, il en sort un autre en 2019, « Wien » avec le Philharmonique de Vienne dirigé par Adam Fischer.

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L’opéra reste néanmoins le cœur de sa discographie. Les compositeurs italiens y tiennent la première place, aux côtés des français (Massenet, Bizet…) et des germaniques (Wagner…). On citera Verdi (Aïda avec Anja Harteros, Ekaterina Semenchuk, Ludovic Tézier, et l’Académie Ste Cécile de Rome dirigée par Antonio Pappano, et le Requiem avec Daniel Barenboim à la tête de l’Orchestre de la Scala avec Elina Garanca et René Pape, sans oublier une compilation d’airs chez Decca), Puccini (CD « Nessun dorma », et DVD de La Fanciulla del West à l’Opéra de Vienne et de Manon Lescaut à Covent Garden) et ses contemporains « fin de siècle » (disques « Verismo » et « The Age of Puccini » avec Antonio Pappano).

 

Star de l’opéra, il sait gérer le succès et ses risques

Le ténor soulève l’enthousiasme du public, mais aussi de ses pairs. Marylin Horne salue son talent dès 2006. Et en 2013, Renata Scotto déclare : « Jonas Kaufmann est mon ténor préféré. Outre la qualité de la voix, superbe et égale sur toute la tessiture, il possède un legato que tous les ténors devraient avoir. Les couleurs, l’intonation, la diction sont parfaites. »

Jonas Kaufmann fait partie des stars qui remplissent une salle sur leur nom. Mais le succès a aussi ses inconvénients. « Parfois, certaines personnes mélangent l’artiste en scène et la personne que je suis en réalité. Comme si, lorsqu’on achetait un billet pour m’entendre, on avait le droit en plus d’acheter quelque chose de moi, » s’insurge-t-il dans Classica en 2014. Médiatique, le ténor est attentif à ne pas tomber dans le piège de la notoriété. « Au moment où vous pensez que le succès coulera de source quoi que vous fassiez, vous n’êtes plus passionné, vous n’avez plus peur, et vous vous perdez. » Alors il travaille de nouveaux rôles et, avec les années, choisit davantage ses productions, quitte à paraître exigent. « Avant, j’étais ravi de signer des engagements plusieurs saisons à l’avance. Mais le moment venu, les projets ne sont plus aussi appropriés. […] Désormais, mon calendrier compte donc beaucoup de trous. »

« Recondita armonia » de Tosca, enregistrement en 2015 de « Puccini album » (Sony)
 

Jonas Kaufmann prône le naturel et critique la surenchère de certaines mises en scène.

On a beaucoup parlé de son physique, ce qui l’a agacé. Si son charme a servi les captations vidéos, comme le Werther de Benoît Jacquot en 2010 – aux côtés de Sophie Koch, Ludovic Tézier, Anne-Catherine Gillet dirigés par Michel Plasson, Decca –, le ténor doit son succès à sa palette de nuances et sa capacité à faire passer l’émotion. « Vous devez créer, non surjouer, rappelle-t-il en 2010 à Classica. […] Il faut penser à une situation et avoir une vision qui vous inspire. Mais si quelqu’un vous dit de marcher comme ça ou de vous tenir comme ci, vous aurez l’air d’un sot car ce ne sera pas vous. » S’il aime profondément le théâtre, Jonas Kaufmann est parfois exaspéré par les metteurs en scène. « Qu’ils fassent donc confiance aux chanteurs et acceptent nos suggestions ! » Il déplore surtout la surenchère. « Un opéra est par nature une interprétation d’un texte dramatique. Pas la peine de rajouter encore une histoire par-dessus », explique-t-il en 2014 à Classica.

Son opéra préféré ? Tosca. « C’est le meilleur scénario d’opéra qui existe. Et si je ne devais choisir qu’un personnage, ce serait peut-être celui de Mario Cavaradossi. Je ne m’en lasse pas, » avoue-t-il à Classica en 2017. Le public non plus. Et le jour où Jonas Kaufmann ne montera plus sur scène, on pourra toujours revoir avec bonheur son dvd paru chez Decca, avec Emily Magee, Thomas Hampson, le chœur et l’orchestre de l’opéra de Zurich, placés sous la direction de Paolo Carignani.

 

Sixtine de Gournay

 

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