Le One Ocean Summit, ce sommet consacré aux océans, se poursuit à Brest jusqu’au vendredi 11 février. Un sommet qui devrait aborder aussi la question de la surpêche car c’est une des menaces majeures qui pèsent aujourd’hui sur la biodiversité marine, y compris au large de nos côtes françaises.
Le Margiris est capable de pêcher 250 tonnes par jour
Vous avez peut-être vu ces images la semaine dernière : ce banc de milliers de poissons morts, des merlans bleus. Dans le golfe de Gascogne, au large de La Rochelle, les images ont été prises par l’ONG Sea Shepherd qui suit les navires usines qui pêchent dans la zone. L’ONG a porté plainte mardi 8 février, elle soupçonne un bateau d’avoir volontairement rejeté ses poissons à la mer. Selon Lamya Essemlali, présidente de Sea Shepherd France : « le merlan bleu est une espèce à très faible valeur ajoutée, c’est généralement entre 12 et 17 centimes le kg et souvent quand ces bateaux pêchent ces poissons qui ne sont pas très intéressants financièrement, la pratique est de les rejeter en mer pour faire de la place dans les cales. C’est une pratique interdite, il y a une obligation de débarquement et de déclaration de capture des espèces ».
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Le propriétaire du bateau en question, le Margiris, parle lui d’un incident de pêche. C’est l’un des navires usines les plus connus. Avec ses 140 mètres de long, il est capable de pêcher 250 tonnes par jour, soit la production annuelle de 5 Fileyeurs. Et au-delà du Margiris, c’est l’impact de ces bateaux et de la pêche industrielle qui est pointé du doigt par les ONG comme Bloom et sa directrice Claire Nouvian : « ils tapent très fort dans les ressources et si elles s’effondrent, ils considèrent que ce n’est pas grave. Ce sont des espèces de bandits mobiles qui vont se déplacer sur une autre ressource. Je pense que la pêche industrielle a déjà beaucoup vidé les océans. On a tout à repenser par rapport à notre gouvernance de l’océan, à notre rapport à celui-ci et à ce qu’on permet aux machines industrielles d’en extraire ».
30% des ressources restent toujours surexploitées avec des conséquences sur les écosystèmes marins
La surexploitation est un problème endémique surtout en Méditerranée confirme Philippe Cury, directeur de recherche de l’Institut de recherche pour le développement, président du conseil scientifique de l’Institut océanographique de Monaco : « la Méditerranée est une mer qui se vide littéralement de ses poissons puisque c’est un des records mondiaux : 90% des stocks de poissons sont surexploités alors que la moyenne mondiale est de 30% ». Les captures dans le monde ont atteint dans les années 90, 100 millions de tonnes par an. Depuis elles baissent très légèrement mais 30% des ressources restent toujours surexploitées avec des conséquences sur les écosystèmes marins. « Cette surexploitation à bien sur des effets sur les espèces qui parfois s’éteignent et elle amène des modifications considérables dans les écosystèmes marins. Cela casse complètement le fonctionnement de l’écosystème et va générer la présence d’autres espèces, généralement à cycle de vie court, comme les méduses » affirme Philippe Cury.
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Ces espèces prennent la place des autres espèces. Selon lui, il faut revoir les attributions de quotas, les ajuster plus finement aux données scientifiques et créer des aires marines protégées où la pêche intensive est interdite. Claire Nouvian de l’ONG Bloom estime qu’il faut au plus vite interdire les subventions à la pêche industrielle. Ces subventions néfastes à la pêche sont en discussion en ce moment et depuis des années à l’OMC avec en vue, un possible accord d’ici le mois de juin.
Baptiste Gaborit