Martin Bouygues lâche les commandes de son groupe et c’est un petit événement. C’est un événement, parce qu’il était aux commandes de ce groupe encore très familial depuis la fin des années 80. Cela fait plus de trois décennies qu’il dirige ce géant du BTP, des télécoms et des médias. Cela fait de lui le patron l’un des plus anciens à la tête d’une entreprise du CAC40. A part Bernard Arnault ou Vincent Bolloré, il n’y a pas de patrons avec une telle longévité.
Martin Bouygues passe la main à Olivier Roussat
Ce groupe, dont sa famille contrôle encore un peu plus de 20% du capital n’a connu depuis sa création dans les années 50 que deux dirigeants, Francis, le fondateur et père de Martin. Et Martin. Et lui va passer progressivement le relais puisqu’il ne sera plus que président du conseil d’administration. Olivier Roussat devenant le Directeur Général, l’homme du quotidien et de l’opérationnel. Pourquoi Martin Bouygues prend du recul ?
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En 2015, l’AFP avait par erreur annoncé sa mort. Il l’avait appris en regardant sa chaîne LCI et ça l’avait un peu surpris parce qu’il est encore bien vivant. Mais il sait que personne n’est immortel et à 68 ans il pense qu’il peut souffler un peu et surtout commencer à préparer sa succession. Il a nommé un DG qui mais il a aussi promu son fils ainé Edward qui a 36 ans, et qui après avoir travaillé chez Bouygues Télécom va poursuivre son apprentissage et se prépare sans doute si possible à prendre un jour la direction du groupe.
Bouygues, menacé par Free, a su relancer la diversification dans les télécoms
Quand on est un héritier on ne peut pas faire n’importe quoi. La priorité c’est de sauvegarder l’essentiel. Et c’est le cas. Bouygues reste un géant mondial du BTP et de la route. Il a aussi réussi la diversification dans les télécoms. Il a été très menacé par l’arrivée de Free mais il a su relancer cette activité. Dans la télé, il a géré le déclin relatif de TF1. On peut dire qu’il lègue un groupe solide. Mais comme d’autres héritiers, il s’est aussi montré prudent, peut-être trop. Dans les médias ou les télécoms, des self-made-men comme Xavier Niel, Patrick Drahi, Vincent Bolloré ou Alain Weill ont pris plus de risques et créé plus de valeur. Lui n’a pas réussi une grosse opération de croissance externe ou de consolidation. Il n’a pas voulu faire tapis comme d’autres en accumulant plein de dettes. Il a été prudent. La prudence ça paye, le groupe est toujours là. Il a grandi mais il n’a pas véritablement changé de dimension.
David Barroux