Du rififi chez les conservateurs allemands de la CDU : Annegret Kramp-Karrenbauer qui était présentée comme la dauphine d’Angela Merkel, a décidé de jeter l’éponge. Que s’est-il passé exactement ?
Angela Merkel a désavoué l’alliance entre son parti et l’AFD, d’extrême-droite
C’est l’onde de choc du vote de la semaine dernière dans la région de Thuringe. Je vous racontais l’affaire ici même vendredi matin : un élu du parti libéral allié à la CDU d’Angela Merkel se retrouve dans le fauteuil de président de région jusque-là détenu par la gauche. Et pour l’emporter, il accepte les voix du parti d’extrême-droite AFD, Alternative pour l’Allemagne, faisant sauter l’une des digues les plus solides de la politique allemande depuis 1945.
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Mais cette élection ne passe pas dans les états-majors de la droite à Berlin, Angela Merkel elle-même monte au créneau pour désavouer cette alliance avec le Diable. Et finalement, l’éphémère président de Région démissionne le lendemain en convoquant de nouvelles élections locales.
Annegret Kramp-Karrenbauer, la présidente de la CDU était accusée de ne pas tenir ses troupes
On se doutait que l’affaire n’en resterait pas là, car pendant 24h, la droite régionale n’a rien dit. Elle semblait même s’accommoder de cette situation inédite. Or, ne rien dire c’était prendre le risque que ce vote fasse école et installe l’extrême-droite AFD en arbitre des élégances dans d’autres scrutins locaux. Voilà pourquoi Annegret Kramp-Karrenbauer a accepté de porter le chapeau. La présidente de la CDU était accusée de ne pas savoir se faire obéir et de ne pas tenir ses troupes avant même le vote en Thuringe. Ce dernier épisode a définitivement ruiné son autorité et elle en a donc tiré les leçons. Même si elle conserve son portefeuille de ministre de la Défense, pour l’instant. Elle renonce à être la prochaine candidate de la CDU au poste de Chancelière, et elle va quitter la présidence du parti. La succession d’Angela Merkel est donc relancée. Cette crise rebat complètement les cartes. Il va falloir trouver un successeur à AKK – comme certains l’appellent – d’ici l’été prochain. Ce qui laisse 4 ou 5 mois pour préparer celui ou celle qui dirigera la CDU et qui mènera les conservateurs aux élections législatives de l’automne 2021, puisqu’il est certain qu’Angela Merkel quittera son poste à ce moment-là, après plus de 15 ans à la tête de l’Allemagne.
Angela Merkel pourrait devoir s’appuyer sur sa bête noire à la CDU, Friedrich Merz
Plusieurs profils sont évoqués, notamment celui de l’actuel ministre de la Santé, celui du patron de la région Rhénanie du Nord-Westphalie ou encore l’ennemi de l’intérieur, Friedrich Merz, souvent présenté comme la bête noire d’Angela Merkel et qui serait favorable à un bon coup de barre à droite des chrétiens-démocrates, en matière d’immigration notamment ! Si c’est lui qui l’emporte, on sera donc dans un paradoxe total : la patronne de la CDU aura démissionné pour n’avoir pas su empêcher une alliance locale avec l’extrême-droite mais son successeur jouera la carte du glissement vers cette extrême-droite pour en siphonner une partie de l’électorat. Avec le risque bien connu que les électeurs choisissent l’original plutôt que la copie.
Emmanuel Faux