Emmanuel Macron a demandé pardon aux harkis : pourquoi il fallait le faire, sans hésiter

S’il y a une catégorie de personnes envers qui ce qu’on appelle la repentance est pleinement justifiée, c’est bien les harkis, ces Algériens musulmans qui avaient été loyaux avec la France et qui ont été purement et simplement abandonnés par le pouvoir gaulliste au lendemain des accord d’Evian.

François Hollande avait reconnu les responsabilités des gouvernements français dans l’abandon des harkis

Ceux, peu nombreux, qui ont été accueillis en France l’ont été dans des conditions indignes. Et ceux, très nombreux qui sont restés dans leur pays ont été livrés à la haine du FLN qui voyait en eux des collabos et qui les a massacrés par millier. Disons le clairement c’est la tâche la plus sombre de la geste gaullienne. Donc oui, à ces Algériens là, et à leurs descendants, la France devait réparation. Réparation morale et réparation financière. Emmanuel Macron y a apporté sa part, dans la lignée, il faut le préciser, de tous ses prédécesseurs.

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Valéry Giscard d’Estaing leur avait reconnu le statut d’anciens combattants. Jacques Chirac avait instauré une journée annuelle d’hommage aux harkis, le 25 septembre. Nicolas Sarkozy avait eu des mots très forts et François Hollande avait explicitement reconnu « les responsabilités des gouvernements français dans l’abandon des harkis ». Hier Emmanuel Macron leur a demandé pardon au nom de la France. C’est un pas de plus. Un pas nécessaire. Il l’a peut-être fait avec des arrière-pensées électorales, mais il vaut mieux une décision juste, même avec des arrière-pensées que pas de décision.

 

Les descendants de harkis, citoyens français, se sentent aussi Algériens

Il y a ensuite le calendrier. En mars prochain, ce sera le 60ème anniversaire de l’indépendance de l’Algérie au terme d’une guerre de huit ans. Une période qui marque encore profondément des millions de Français. Les descendants de harkis, on l’a dit, ou ces enfants de l’immigration, citoyens français, se sentent aussi Algériens. Cette mémoire est donc vive, blessée pour certains, remplie d’acrimonie pour d’autres qui sous l’influence de discours du pouvoir algérien, continuent de voir dans la France leur ancien colonisateur. Alors l’ambition de Macron c’est d’affronter ces mémoires contraires, en faisant le pari de les réconcilier par un travail historique qui repose sur la « reconnaissance » de la vérité mais qui refuse la « repentance ».

 

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D’où le rapport présenté il y a quelques mois par l’historien Benjamin Stora, rapport qui persiste à ne voir que les aspects négatifs ou condamnables de la colonisation mais qui tend malgré tout à apaiser le travail mémoriel. Avec cette demande de pardon aux harkis, c’est d’abord une affaire de vérité et de justice. C’est un préalable à toute réconciliation. Ensuite c’est un geste parmi de nombreux autres qui ont tendu à reconnaître les responsabilités de la France. Dans un mois il y aura un autre anniversaire difficile, celui de la manifestation réprimée des Algériens de Paris le 17 octobre 1961. Il faudra cette fois s’attendre à des paroles destinées aux Algériens. Là aussi, Macron est dans le « en même temps ».

Guillaume Tabard

 

 

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