Alexandre Kantorow est le premier pianiste français à avoir remporté le 1er Prix du Concours Tchaïkovsky de Moscou. Fils du violoniste Jean-Jacques Kantorow, il a enregistré ses premiers disques aux côtés de son père. Son jeu tour à tour passionné et flamboyant, ou profond et tout en finesse, soulève l’enthousiasme du public autant que de la critique.
Alexandre Kantorow en 7 dates :
- 1997 : Naissance à Clermont-Ferrand
- 2002 : Commence le piano au Conservatoire de Cergy-Pontoise
- 2013 : Entre au CNSM de Paris dans la classe de Franck Braley
- 2015 : Enregistre les 2 Concertos de Liszt avec son père à la baguette (Bis)
- 2017 : « A la russe », 1er disque solo (Bis)
Travaille avec Rena Shereshevskaya à l’Ecole Normale - 2019 : 1er Prix au Concours Tchaïkovsky de Moscou
- 2020 : Victoires de la musique, catégorie « Soliste instrumental »
Alexandre Kantorow commence le piano à 5 ans et entre au CNSM de Paris à 16 ans
Son père, Jean-Jacques Kantorow, est violoniste concertiste et chef d’orchestre. En 1981, il fonde l’Orchestre d’Auvergne, où sa mère joue dans les pupitres de violon. Alexandre naît donc à Clermont-Ferrand, en 1997. La famille déménage en région parisienne deux ans plus tard. Enfant précoce, Alexandre sait lire à 2 ans et demi et sautera deux classes durant sa scolarité. « J’ai toujours été très libre dans mes choix, mais je n’aurais peut-être pas fait du piano si je n’appartenais pas à une famille de musiciens, » confie-t-il à Classica en 2019. A 4 ans, il déchiffre déjà la musique. Son père le met au violon, mais l’enfant n’accroche pas : l’essai durera… 3 jours ! Il préfère le piano, qu’il démarre à 5 ans au Conservatoire de Cergy-Pontoise. Comme Lang Lang, c’est le dessin animé Tom et Jerry qui sert de déclic, avec la Rhapsodie hongroise n°2 de Liszt. A 11 onze ans, Alexandre Kantorow prend des cours avec le pianiste Pierre-Alain Volondat, partenaire de musique de chambre de son père. L’idée de devenir lui aussi professionnel fait lentement son chemin dans sa tête. En 2020, il avoue au magazine Pianiste : « Je voulais vraiment être normal. C’est aussi pour cette raison que la musique n’avait pas une place trop centrale. […] Ce qui était important alors, c’était de s’adapter et d’être comme tout le monde. J’éprouve toujours ce besoin de ne pas être si différent des autres ». Il étudie à la Schola Cantorum de Paris avec Igor Lazko, puis se décide à tenter le CNSM de Paris. Il y entre à 16 ans, alors qu’il est en terminale au Lycée Racine, en classe à horaires aménagés. Une année placée sous le signe du succès, puisqu’il obtient aussi son bac scientifique avec mention Très Bien.
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Son père, le violoniste Jean-Jacques Kantorow, facilite le début de sa carrière.
Son père le présente à son agent, Diane du Saillant, et son label Bis. Il lui trouve aussi ses premiers concerts. A 16 ans, Alexandre est invité avec le Sinfonia Varsovia aux Folles Journées de Nantes, et en récital aux Lisztomanias de Châteauroux. Il fait aussi des débuts remarqués au Concertgebouw d’Amsterdam.
La bonne entente entre le père et le fils les poussent à jouer et enregistrer ensemble. Un disque de musique de chambre paraît d’abord en 2013 chez NoMadMusic, avec les sonates de Fauré, Chevillard et Gédalge. En 2015, ce sont les deux concertos de Liszt, puis les Concertos n°3, 4 et 5 de Saint-Saëns en 2019, chez Bis cette fois, avec le Tapiola Sinfonietta et Jean-Jacques Kantorow à la baguette. Le jeu orchestral d’Alexandre, à la fois coloré, puissant, et pourtant non dénué de finesse, séduit le public et la presse. Et le pianiste de 23 ans remporte une Victoire de la musique en 2020 dans la catégorie « Soliste instrumental ». Le jeune homme s’est par ailleurs confié à Pianiste sur l’influence qu’un père violoniste a pu avoir sur son jeu. « Au violon, il existe un temps entre les intervalles qui est plus naturel. Une sorte de rubato que j’essaie de reproduire. J’ai assimilé beaucoup de choses [grâce à mon père] en termes de caractère et d’interprétation. »
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Le pianiste est le premier français à remporter le Concours Tchaïkovsky
Après le CNSM, Alexandre Kantorow se perfectionne avec Rena Shereshevskaya à l’Ecole Normale de Musique. « Le style de travail était radicalement différent avec elle. Elle m’entraînait jusqu’aux limites de mes possibles. Les professeurs russes ont cet ADN. Il y a peu de professeurs français qui apprécient les concours, s’investissent et prennent du temps pour la préparation à ce point-là. C’était quasiment sportif, elle devenait un coach, » se souvient Alexandre Kantorow pour Classic Agenda en 2021. L’objectif est désormais le Concours Tchaïkovsky à Moscou. La pédagogue avait déjà présenté Lucas Debargue à ce concours en 2014, lequel était arrivé 4ème. Et en juillet 2019, Alexandre Kantorow devient le premier pianiste français à remporter – à l’unanimité, de surcroît ! – le 1er Prix ce cette compétition où triomphe traditionnellement les Russes. Le jury, composé de Nelson Freire, Michel Béroff, Menahem Pressler, Barry Douglas, est présidé par Denis Matsuev. Il se voit même décerner le Grand Prix, tous instruments confondus, par le président du concours Valery Gergiev. Désormais les engagements affluent, sa carrière est lancée. On l’entendra par la suite au festival Piano aux Jacobins à Toulouse, à l’Auditorium Stravinsky à Montreux, ou encore à la Fondation Louis Vuitton à Paris. Mais l’artiste garde les pieds sur terre, et n’oublie pas ceux qui lui ont fait confiance jusque-là. Si les grandes majors du disque lui ont offert des contrats après le concours, Alexandre Kantorow a préféré rester chez Bis. « J’avais besoin de retrouver mon environnement familier. C’est aussi une liberté. […] Je peux faire ce que je veux artistiquement. »
Alexandre Kantorow dans la Ballade op.10 de Brahms et L’Oiseau de feu de Stravinsky (Concertgebouw Sessions)
Brahms, Liszt, ou Tchaïkovsky, ses compositeurs de prédilection sont des romantiques
En 2017 paraît un premier album solo intitulé « A la russe », avec des pièces de Rachmaninov, Tchaïkovsky ou encore Balakirev. S’il a des origines paternelles russes, le pianiste attribue plutôt ce choix à l’influence de ses professeurs issus de l’école russe, qui l’ont formé à ce répertoire. On le retrouve en 2020 sur un autre disque solo, qui mêle cette fois Liszt, Bartok et Brahms. Alexandre Kantorow reconnaît une prédilection pour Brahms, dont il avait choisi le 2ème Concerto pour le Concours Tchaïkovsky. « Je me sens bien dans cette musique. […] Elle exprime une perfection comme chez les grands compositeurs classiques. Avec cette impression que chaque note compte, et cette dimension très cérébrale et structurée. Et en même temps, ce perfectionnisme est associé à quelque chose de très digne. […] Elle comporte aussi une part de risque, » explique-t-il à Pianiste après la sortie de l’album. Il revient encore à Brahms en 2021, en enregistrant les 4 Ballades et la 3ème Sonate. Pour nourrir ses interprétations, Alexandre Kantorow lit volontiers Shakespeare, Hugo, Dumas, ou Hesse. Mais son amour des romantiques ne l’empêche nullement de s’intéresser aussi à la musique contemporaine. Ainsi est-il le destinataire d’un concerto de Guillaume Connesson.
Avant d’entrer sur scène, Alexandre Kantorow écoute toujours de la musique (classique) pour « se mettre dans une certaine ambiance […] Les moments d’abandon sur scène ne peuvent exister qu’avec un détachement vis-à-vis de toutes les pressions extérieures […] Quand on y parvient, il n’existe plus qu’une sorte de déroulé intérieur. Il faut alors espérer que les doigts suivent. C’est pour cela qu’on travaille énormément, pour se permettre ces moments d’oubli. »
Sixtine de Gournay
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