Guerre en Ukraine : L’Egypte, première victime d’un embargo sur le blé

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L’Egypte dépend très majoritairement du blé ukrainien et russe pour sa stabilité alimentaire. Alors quand Vladimir Poutine menace d’approvisionner uniquement les « amis » de la Russie, le pays tremble sous la menace d’une pénurie qui aurait des conséquences sociales dévastatrices.

85% du blé consommé en Egypte vient de Russie et d’Ukraine

Le 30 mai s’est ouvert le sommet européen avec au menu des discussions entre les 27 pays membres, la guerre en Ukraine et la dépendance aux énergies russes. Les membres de l’Union seront également amenés à aborder la question de la sécurité alimentaire. Les Européens souhaitent augmenter leurs aides en direction des pays les plus fragiles car la Russie et l’Ukraine représentent à elles deux, près d’un tiers des exportations mondiales de blé. Le conflit qui les oppose engendre une tension sur les marchés, et provoque une inflation record sur le blé. La tonne se négocie désormais autour des 400 euros.

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C’est une véritable menace pour la stabilité de certains pays qui, si le conflit se prolonge, auront de plus en plus de mal à nourrir leur population. Comme l’Egypte qui est la première importatrice mondiale de blé. En effet, 85% du blé consommé en Egypte vient de Russie et d’Ukraine. Le conflit actuel désorganise les routes commerciales, et fait craindre au Caire de ne plus être suffisamment approvisionné. Selon l’économiste Thierry Pouch, à termes cette situation pourrait entrainer le pays à devoir faire face à des émeutes de la faim : « il y a une crainte importante de voir ces pays se soulever comme en 2011 avec le Printemps arabe. Cela amplifierait l’instabilité géopolitique actuelle ». Aujourd’hui la menace de Moscou est claire. Seuls les « amis » de la Russie seront livrés en blé.

Plus le conflit ukrainien se prolonge, plus l’hypothèse d’une famine dans les pays importateurs prend de l’ampleur

Cela force certains pays comme ceux du Maghreb, le Liban et l’Egypte à garder le silence, et à s’éloigner de l’Occident sur le dossier ukrainien :« le blé devient une arme alimentaire. C’est un moyen pour la Russie d’être présent sur tout le bassin méditerranéen ». Le Kremlin pourrait ainsi y sécuriser ses routes commerciales et amortir les effets des sanctions occidentales. D’autant que Moscou a un autre atout. Avec 90 millions de tonnes de blé, les récoltes de cette année s’annoncent records. Pour, l’expert du marché agricole, Thierry Pouch c’est une véritable arme diplomatique : « cela donne un pouvoir d’influence qui permet de compenser les sanctions qui ont été infligées à la Russie ». A mesure que le conflit ukrainien se prolonge, l’hypothèse d’une famine dans les pays importateurs prend de l’ampleur. Une hantise pour l’Egypte, où les boulangeries ont déjà reçu l’ordre de rationner le pain.

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En effet si, l’Egypte dépend à 85% du blé russe et ukrainien, avec le conflit en cours, c’est la sécurité de ses approvisionnements qui est en danger. Moscou bloque les exportations ukrainiennes, et pratique une politique de rétention de son blé. Le réservant aux pays « amis » du Kremlin et les vendant à ses conditions. Une situation délicate pour le Caire, qui craint que ses populations les plus fragiles (un tiers des Égyptiens vivent sous le seuil de pauvreté) subissent de plein fouet l’inflation et ne trouvent plus à se nourrir. Selon Arthur Portier, consultant spécialiste du marché agricole chez Agritel, le contexte n’offre à l’Egypte que trop peu de solutions : « la météo dégradée en France et aux Etats-Unis et les niveaux de prix extrêmement élevés peuvent inévitablement mettre en péril la sécurité alimentaire du pays. Il pourrait être obligé de prendre des mesures drastiques en subventionnant l’alimentation ou en distribuant des tickets de rationnement afin d’éviter d’importants troubles sociaux ».

Eric Kuoch

Ecoutez le reportage d’Eric Kuoch : 

 

Ecoutez l’intervention d’Arthur Portier : 

 

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