Une filière divisée et une forêt en danger, c’est dans ce contexte que se sont ouvertes les Assises de la forêt et du bois hier, le 19 octobre.
La filière bois représente plus de 400 000 emplois en France
800 millions d’euros sont en jeu pour refonder une filière qui aurait pu être un fleuron de l’industrie française. Les forêts françaises sont aujourd’hui menacées par le changement climatique. Dans la filière bois on parle à demi-mots du cœur du problème de ce secteur : les relations tendues entre « l’amont et l’aval », c’est-à-dire entre ceux qui s’occupent des arbres et ceux qui les transforment. « Entre la première et la deuxième transformation, on est obligés d’importer d’Autriche et d’Allemagne » déplore Luc Charmasson, président du Comité stratégique de la filière bois. Selon lui on est obligé d’importer parce qu’il n’y a pas, en France, les industries qui transforment le bois brut issu de nos forêts en bois d’industrie qui va servir aussi bien à la construction qu’à l’ameublement. Le blocage est donc structurel et pourtant les enjeux sont énormes : la filière représente plus de 400 000 emplois en France, c’est plus que celle de l’automobile.
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Selon Luc Charmasson, « on a créé 20 000 emplois les deux dernières années et on pense que d’ici 3 ans on pourra en recréer 60 000. C’est un enjeu stratégique pour l’économie française ». L’enjeu est aussi climatique rappelle la députée LREM Anne-Laure Cattelot, auteur d’un rapport sur la forêt et le bois : « la forêt est notre or vert, il ne faut pas oublier que ce puits de carbone absorbe l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre produit par le transport de marchandises et de personnes en France ». Elle souligne toutefois que le bois est un matériau décarboné extrêmement intéressant pour la filière du bâtiment.
En France, 79% des arbres ont moins de 100 ans
Bruno Doucet, de l’association de Défense des forêts Canopée met en garde : attention à ne pas déformer les forêts pour répondre aux demandes d’un marché trop versatile. Selon lui, « un petit insecte nommé le scolyte, est en train de ravager les monocultures d’épicéas que l’on a planté il y a 50 ans. On est en train de réitérer la même erreur des monocultures avec le douglas ».
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Plutôt que des monocultures, il vaut mieux selon Bruno Doucet, des forêts diversifiées auxquelles on laisse le temps de vieillir : « plus les arbres en forêts sont vieux, plus le puit de carbone est grand. Pourtant en France on a 79% des arbres qui ont moins de 100 ans. Cet âge n’est pas spécialement vieux pour un arbre ce qui veut dire que la forêt a encore une grande capacité de stockage de carbone et que l’on a plutôt intérêt à laisser vieillir nos forêts et de ne pas les couper de plus en plus tôt ». C’est la forêt du siècle prochain qui se décide à ces Assises, la filière en est consciente : professionnels, élus et associations ont jusqu’au mois de janvier pour prendre des décisions.
Laurie-Anne Toulemont