Les 110 milliards d’euros consacrés par l’Etat au bouclier tarifaire sur l’électricité et le gaz ont-ils été utilement dépensés ? C’est à cette question essentielle qu’ont voulu répondre les chercheurs de l’Institut des politiques publiques, l’IPP, un organisme indépendant. Un travail très éclairant.
Le bouclier tarifaire a augmenté la dette française en valeur absolue, mais il a généré de la croissance
Il s’agit d’une analyse purement économique, c’est-à-dire sans parti pris idéologique. Et la réponse est sans appel. C’était le meilleur compromis possible face à la crise énergétique. D’abord, parce qu’en limitant fortement la hausse des prix de l’énergie, il aura permis de ramener l’inflation à moins de 6,5% cette année, soit à un niveau très inférieur à ce qu’auront connu nos voisins. Cela a permis d’éviter l’enclenchement de la très redoutée spirale prix-salaires, qui ancre durablement l’inflation dans l’économie. La seconde raison, c’est qu’en amortissant la baisse du pouvoir d’achat, le bouclier a limité le recul de la consommation des ménages, et donc soutenu l’activité. Selon l’IPP, on lui doit un surcroît de près de 2 points de PIB en 2022. En clair, si ce dispositif coûteux a accru la dette française en valeur absolue, il n’a pas pesé sur le taux d’endettement, puisqu’il a généré de la croissance.
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Le bouclier tarifaire sera prolongé en 2023, avec une aide réduite
Le rapport de l’IPP souligne toutefois que le bouclier tarifaire a moins bien protégé les Français les plus modestes, pour une raison simple : l’énergie représente une part plus importante dans leur budget. Mais sans cette protection, la situation aurait été beaucoup plus difficile pour eux. Alors bien sûr, on aurait pu rêver d’un dispositif plus ciblé et adapté aux besoins de chaque catégorie socio-professionnelle. Mais outre que cela aurait rapidement tourné à l’usine à gaz étant donné la diversité des profils, le résultat macro-économique aurait été moins bon. Selon l’IPP, le versement d’un chèque aux ménages aurait provoqué un effet d’éviction, une partie des sommes perçues se retrouvant sur un livret d’épargne. La question désormais est de savoir si le bouclier tarifaire reste efficace dans la durée. Réponse l’an prochain, puisque l’Etat a décidé de le prolonger en 2023 en le rendant un peu moins généreux.
François Vidal