Guerre en Ukraine : Le secteur aérien au cœur des tensions entre la Russie et l’Occident

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La Russie a annoncé qu’elle fermait son espace aérien aux compagnies aériennes de 36 pays, dont la France. C’est une réaction attendue à la décision récentes des Etats occidentaux d’interdire de vol les avions des compagnies russes.

Air France et la Lufthansa ont estimé le surcoût à une dizaine de millions d’euros par semaine

Il va devenir plus difficile de rentrer ou de sortir de Russie, à un moment où de nombreux étrangers veulent quitter la région. Dans ce pays qui est le plus vaste du monde, l’avion est le seul moyen de voyager rapidement, rappelle Bruno Trévidic dans Les Echos. La fermeture des espaces aériens aura aussi des incidences sur les compagnies européennes qui devront faire un gros détour – coûteux en carburant – pour desservir la Chine, le Japon et la Corée. Air France et la Lufthansa ont déjà estimé le surcoût à une dizaine de millions d’euros par semaine. Après deux années compliquées par le Covid, 2022 s’annonce être une année encore difficile pour le secteur.

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Les Occidentaux sont allés encore plus loin dans les sanctions contre le secteur aérien. Non seulement, les avions russes ne pourront plus survoler leurs territoires mais les Etats-Unis et l’Union européenne ont aussi interdit l’exportation vers la Russie de leurs avions, qu’ils viennent de chez Boeing, d’Airbus, de Bombardier ou d’Embraer. Il est désormais impossible pour les compagnies locales, d’acheter des appareils ou même de les louer. L’interdiction concerne également les pièces détachées pour les avions en circulation. Cela veut dire que si le conflit devait durer – et on en prend le chemin – les compagnies russes auront du mal à entretenir correctement leur flotte et notamment les moteurs, sauf à prendre des risques avec la sécurité des passagers. L’objectif affiché est de clouer au sol les avions civils russes pour isoler le pays. Une tactique déjà appliquée par les Etats-Unis contre l’Iran qui avait entraîné l’immobilisation de la moitié de la flotte civile iranienne.

Quels sont les enjeux pour Airbus et Boeing ?

Dans le viseur se trouve notamment, le Super Jet, le seul nouvel avion civil russe lancé depuis la fin de l’URSS. Un avion régional dont 70% des composants viennent de l’étranger et notamment le moteur fabriqué par Safran. Le Kremlin avait annoncé il y a un an, son intention d’investir plus d’un milliard d’euros pour développer une nouvelle version « Made in Russia » de cet avion qui embarque moins de 100 passagers. Mais il est loin d’être prêt.

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Alors quels sont les enjeux pour Airbus et Boeing ? On pense bien sûr à d’éventuelles annulations de commande. Aeroflot devait encore recevoir une douzaine d’Airbus A350. Mais un autre sujet préoccupe la filière, c’est celui des livraisons de titane dont la Russie est le premier producteur mondial. L’aéronautique est l’un des plus gros utilisateurs de titane, un métal léger et résistant. On le trouve dans les moteurs, les trains d’atterrissage ou dans certaines parties du fuselage. Or, 50% du titane consommé par l’industrie aéronautique européenne proviennent d’un groupe russe, une filiale de Rostec. Airbus et Safran ont augmenté récemment leurs stocks face aux tensions géopolitiques. Il y a donc de quoi tenir au moins à court, voire à moyen terme.

Pierrick Fay

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