GLUCK Christoph Willibald

(1714-1787) Epoque classique

Les opéras de Gluck sont inscrits dans l’histoire de l’art lyrique comme ceux de l’expression pure par la musique des sentiments et de la passion. Son langage musical se veut universel, au-delà des parti-pris nationalistes de l’époque. Avec lui, la composition orchestrale prend une place essentielle à côté de la voix, ce qui fera de Berlioz le grand défenseur de la musique de Gluck, décidant de sa vocation de compositeur après une représentation d’Iphigénie en Tauride en 1821, et redonnant vie, avec la cantatrice Pauline Viardot, à Orphée et Eurydice un siècle après sa création.

Christoph Willibald Gluck en 10 dates :

  • 1714 : Naissance à Erasbach (Haut-Palatinat)
  • 1731 : Études à Prague
  • 1736 : Arrivée en Italie comme maître de chapelle à Milan
  • 1741 : Artaserse (création)
  • 1752 : La Clemenza di Tito (création)
  • 1762 : Orfeo ed Euridice (composition et création)
  • 1767 : Alceste (composition)
  • 1774 : Iphigénie en Aulide (création)
  • 1779 : Iphigénie en Tauride (création)
  • 1787 : Mort à Vienne

 

Gluck choisira la musique plutôt que les Eaux et Forêts

Gluck est né dans une famille de veneurs et de forestiers de Bohème, ses ascendants sont maîtres des Eaux et Forêts au service des princes du royaume de Bohême. Le père de Christoph Willibald entend que son fils suive la tradition. Mais celui-ci s’intéresse plutôt à la musique, apprend le violon et joue en secret de la guimbarde ! Il part à Prague dès qu’il a l’âge de s’émanciper et commence des études de philosophie. Mais il préfère suivre l’enseignement musical d’un franciscain et aller au concert entendre la musique italienne. Il est ensuite nommé maître de chapelle à Milan, où il se forme auprès du compositeur Sammartini. Il restera plusieurs années en Italie pour y créer ses premiers opéras, Artaserse à Milan, Demetrio à Venise, Tigrane à Crémone, la plupart sur des livrets du grand poète italien Metastasio. Après une période d’itinérance en Europe avec une troupe de musiciens italiens, Gluck épouse Marianne Pergin à Vienne en 1750, fille d’un riche négociant viennois avec qui il est fiancé depuis deux ans. Ses plus grands succès sont à venir. Le premier est La Clemenza di Tito au San Carlo de Naples en 1752. Le castrat Caffarelli chante Sesto, dont l’air « Se mai senti spirarti sul volto » (Si tu sens passer un jour sur ton visage…) créé une grande émotion dans le public, incitant Gluck à le réutiliser plus tard dans Iphigénie en Tauride.

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Au fil des ans Gluck enchaîne les succès, et les chefs-d’œuvre, à commencer par Orphée et Euridice 

Orphée et Euridice est créé à Vienne en présence de l’impératrice, en 1762. Le castrat Guadagni chante le rôle d’Orphée. Cette première version italienne sera suivie en 1774 de son adaptation française, avec un ténor qui malgré les inquiétudes du compositeur remporte les suffrages. Jean-Jacques Rousseau applaudit et Julie de Lespinasse, égérie des Encyclopédistes, se pâme, écrivant que « ses larmes et sa douleur sont douces » !

« Che faro senza Euridice » d’Orphée et Euridice (Philippe Jaroussky, dir. Diego Fasolis)

 

Après sa période viennoise, qui voit aussi la création d’Alceste, Gluck prépare son arrivée à Paris en se disant fervent partisan de la tragédie lyrique française. Il se lance alors dans le projet Iphigénie, la tragédie d’Euripide, sur un livret adapté de la pièce de Racine représentée à Versailles un siècle plus tôt. Iphigénie en Aulide est en 1774 un véritable phénomène parisien. Les répétitions compliquées font parler tout le milieu musical jusqu’au roi et la reine, et le succès est au rendez-vous malgré certains opposants germanophobes.

 

Iphigénie en Tauride est créé en pleine querelle avec les partisans de Piccini

Iphigénie en Tauride est créée avec autant de succès cinq ans plus tard à l’Académie royale de musique, en présence de la reine Marie-Antoinette. On est alors en pleine querelle musicale entre Piccinni et Gluck, arbitrée sans trancher pour l’un ou pour l’autre par le Padre Martini, historien de la musique respecté de tous. Prolongement de la Querelle des Bouffons née vingt cinq ans plus tôt, qui opposait les partisans de Rameau à ceux de Pergolèse, cette nouvelle querelle esthétique éclot sur fond de nationalisme. C’est dans cette ambiance que le pauvre Mozart débarque à Paris en 1778, et s’en trouve la victime collatérale en repartant chez lui sans commande ni succès parisiens. Gluck, quant à lui, connaît un échec avec son ultime opéra présenté à Paris, Écho et Narcisse, une pastorale sur un livret assez faibleLe compositeur, malade, rentre à Vienne très déçu. Il devient une gloire vieillissante et ne compose plus d’opéra. Il meurt en 1787, laissant à sa femme une petite fortune.

 

 Philippe Hussenot

 

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