Le 31 janvier 2021, lors de la 63e cérémonie des Grammy Awards, Ethel Smyth pourrait devenir la première compositrice classique récompensée, 76 ans après sa disparition. Son opéra The Prison, composé en 1930, est nommé dans la catégorie « Meilleur album vocal solo ». Ce serait une juste consécration pour cette grande musicienne britannique, également très engagée dans le combat des suffragettes pour le droit de vote des femmes au Royaume-Uni au début du 20e siècle.
Ethel Smyth a composé une centaine d’œuvres dont 7 opéras
Ce sera seulement la 2e fois dans l’histoire des Grammy Awards que l’œuvre d’une compositrice concourra pour un prix après l’Américaine Amy Beach (1867-1944) en 2007, déjà nommée dans la catégorie « Meilleur album vocal solo classique », pour une de ses compositions chantée par le baryton américain Patrick Mason. A Los Angeles fin janvier, c’est l’interprétation par la soprano Sarah Brailey et le baryton-basse Dashon Burton, dirigés par James Blachly du Johnstown Symphony Orchestra, de l’opéra The Prison, composé en 1930 par Ethel Smyth, qui sera en lice dans cette catégorie prestigieuse.
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Cet opéra fut le dernier écrit par la compositrice anglaise alors qu’elle était atteinte d’une surdité évolutive qui l’a contrainte à arrêter sa carrière de musicienne au début des années 30. En plus de 50 ans d’activité elle aura créé une centaine de compositions. Des œuvres pour piano, pour orchestre, musique de chambre, musique vocale et 7 opéras. Mais surtout elle a marqué le début du XXe siècle tant par son talent musical que par ses engagements pour la cause des femmes.
Ethel Smyth composa l’hymne des suffragettes et fut anoblie en 1922
Née en 1858 à Londres, d’une mère française et d’un père militaire britannique, Ethel Smyth décide à l’âge de 12 ans d’étudier la musique. À 19 ans, confrontée aux réticences de ses parents, elle décide de s’exiler en Allemagne où elle s’inscrit à l’école de musique de Leipzig. Une étape déterminante pour sa carrière de compositrice qui l’amène à fréquenter d’immenses musiciens tels que Johannes Brahms, Clara Schumann ou Piotr Ilitch Tchaïkovski, qui l’encouragent à persévérer dans cette voie. En 1890, Ethel Smyth revient en Angleterre où ses 1ères œuvres sont jouées, notamment au Crystal Palace ou au Royal Albert Hall avant d’être interprétées sur les plus grandes scènes du monde dont celle du Met Opera à New York en 1903.
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Parallèlement à sa carrière musicale, dès 1910 Ethel Smyth s’engage dans le mouvement des suffragettes qui milite pour le droit de vote des femmes au Royaume-Uni. On lui doit même l’hymne du mouvement (The March of the Women) et, en 1912, elle passe 2 mois en prison pour avoir jeté une pierre et brisé la fenêtre de la résidence d’un secrétaire d’État lors d’un rassemblement. Au cours de la 1ère Guerre mondiale, elle rejoint l’hôpital militaire de Vichy comme infirmière. Des engagements qui lui valurent d’être anoblie en 1922 par le roi George V. Dame Ethel Smyth mourut à Woking en 1944, à l’âge de 86 ans.
Philippe Gault