Beethoven : Le violoniste métis pour qui il a d’abord créé la célèbre « Sonate à Kreutzer » a désormais une plaque à Londres

Crédit: Lewis Patrick

244 ans jour pour jour après la naissance de George Bridgetower, la ville de Peckham a dévoilé une plaque commémorative en hommage à ce grand violoniste britannique qui vécut ses dernières années dans cette ville de la banlieue sud de Londres. C’est avec ce musicien métis que Ludwig van Beethoven interpréta pour la 1ère fois sa Sonate pour piano et violon n°9.

Fâché avec George Bridgetower , Beethoven dédia sa sonate à Rodolphe Kreutzer qui ne l’a jamais jouée

L’histoire avait pourtant bien commencé. Le 24 mai 1803 à Vienne Ludwig van Beethoven au clavier joua pour la 1ère fois sa Sonate pour piano et violon n°9 en la majeur accompagné au violon par George Bridgetower, un jeune violoniste virtuose britannique, métis de 25 ans, qui l’avait impressionné et à qui il dédicaça le jour même cette œuvre. Sur la partition, Beethoven écrivit même « Sonate mulâtre, composée pour le mulâtre Bridgetower, grand fou et grand compositeur mulâtre ».

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Las, le soir même les deux musiciens, légèrement éméchés, s’embrouillèrent. A la suite de cette querelle, le compositeur allemand décida de dédier son oeuvre au violoniste français Rodolphe Kreutzer qu’il avait rencontré quelques années plus tôt à l’ambassade de France à Vienne. C’est ainsi que cette composition pour piano et violon, la plus célèbre de Beethoven, prit le nom de Sonate à Kreutzer. Un morceau que le musicien français ne joua pourtant jamais, la jugeant « inintelligible ». Quelques année plus tard, en 1889, Léon Tolstoï intitula Sonate à Kreutzer un de ses derniers romans.

George Bridgetower joua à Paris à l’âge de 11 ans sous les yeux de Thomas Jefferson

Si ce malheureux épisode a marqué sa carrière, George Bridgetower a joui néanmoins d’une grande renommée en France et en Grande-Bretagne au début du XIXe siècle. Né en 1778 en Pologne, d’un père britannique originaire de la Barbade et d’une mère allemande, il fut un violoniste virtuose précoce donnant son premier concert à Francfort à l’âge de 8 ans. Il fit même sensation à Paris lorsqu’il se produisit au Panthéon à 11 ans sous les yeux de Thomas Jefferson, futur Président des États-Unis, et du Chevalier de Saint-George qui fut probablement à l’origine de la participation du jeune violoniste.

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La plaque bleue (Signe permanent installé sur un bâtiment pour commémorer un lien avec une personnalité y ayant vécu) qui a été dévoilée le 11 octobre à Peckham, où George Bridgetower mourut en 1860, est née de l’initiative de Tara Louise Jettoo avec la participation du Nubian Jak Community Trust, un programme qui met en lumière « les contribution historiques des noirs et des minorités ethniques en Grande-Bretagne ». Cette jeune musicienne avait déjà lancé une pétition pour exiger l’installation d’une plaque commémorative au nom de George Bridgetower à Bath où il se produisit à de nombreuses reprises. L’histoire de ce musicien avait été racontée par l’écrivain Emmanuel Dongala en 2018, La Sonate à Bridgetower, aux éditions Actes Sud. En 2021, le violoniste australien Richard Tognetti a signé une tribune dans la presse locale demandant à ce que la Sonate pour piano et violon n°9 en la majeur de Beethoven porte justement ce nom.

Philippe Gault

 

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