ENA supprimée : « une forme de populisme », selon Najat Vallaud-Belkacem

Najat Vallaud-Belkacem était l’invitée politique de la matinale de Guillaume Durand ce lundi 12 avril. L’ancienne ministre de l’Éducation nationale a évoqué les régionales auxquelles elle prend part en tant que candidate socialiste en Auvergne-Rhône-Alpes. Elle a également vivement critiqué la manière dont l’ENA a été supprimée par le gouvernement.

Covid-19 et maintien des élections régionales : « Le rôle du gouvernement est de garantir que la démocratie continue en toutes circonstances »

La candidature de Najat Vallaud-Belkacem aux élections régionales marque son retour en politique, un choix qu’elle justifie par le fait de « croire fondamentalement dans la nécessité de défendre le bien commun ». Elle met en opposition ses valeurs et ses ambitions personnelles avec celles qu’elle prête à Laurent Wauquiez, candidat sortant en Auvergne-Rhône-Alpes : « ce n’est pas parce que les gens sont en politique qu’ils défendent forcément le bien commun (…) j’ai l’impression que Laurent Wauquiez fait tout son possible pour utiliser les moyens de cette région afin de capter le pouvoir et le garder (…) je n’ai pas l’impression qu’il œuvre pour l’intérêt général ».

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La consultation des maires de France lancée par le gouvernement à propos du maintien des élections régionales les 13 et 20 juin, demandant aux maires de donner un avis positif ou négatif en trois jours seulement, a été dénoncé par beaucoup comme une tentative de manipulation. Pour l’Association des maires de France, ce délai est « non approprié pour traiter une question de cette importance », Najat Vallaud Belkacem évoque elle aussi une manipulation et s’inquiète de l’état de la démocratie : « cela ressemble en effet à une manipulation, dans cette crise qui dure depuis trop longtemps si une chose doit bien rester debout c’est la démocratie, sinon on a plus aucune perspective (…) cela serait un échec impardonnable du gouvernement de décider de leur report sans n’avoir rien fait depuis un an pour les organiser dans de bonnes conditions ». La candidate socialiste en Auvergne-Rhône-Alpes décrit même une manœuvre politique : « les maires ont grincé des dents car ils ne sont jamais consultés sur les sujets qui en valent la peine, on les consulte quand ça arrange le gouvernement (…) je crains qu’il y ait des considérations de basse politique ». Loin d’un procédé classique comprenant tractage, meetings et contact direct avec la population, des alternatives pourraient être envisagées selon Najat Vallaud-Belkacem pour maintenir le scrutin : « des nouvelles règles sont à installer, une campagne sur des médias audiovisuels à défaut de se tenir sur le terrain (…) les assesseurs dans les bureaux de votes doivent être vaccinés (…) l’erreur consisterait à décider d’une date de report en fonction des circonstances, alors que le rôle du gouvernement est de garantir que la démocratie continue dans tous les cas ».

 

Najat Vallaud-Belkacem : « Quelque chose n’est pas net dans la gestion de l’affaire ENA par le gouvernement »

Selon Najat Vallaud-Belkacem, la perspective d’une gauche réunie parait à ce jour « complètement farfelue » pour les électeurs. Ainsi, alors qu’il semble difficile de mobiliser les partisans de la gauche dans un tel contexte, l’ancienne ministre de l’Education Nationale appelle donc à remédier à ces divisions : « la balle est dans notre camp, celui des responsables politiques de gauche (…) à l’échelle des territoires et des régions, il y a un véritable travail fait par les candidats aux élections régionales afin d’œuvrer au rassemblement (…) je ne tire pas un trait sur notre capacité à rassembler ». Selon Najat Vallaud-Belkacem, la première étape de ce rassemblement avant l’élection présidentielle doit être d’afficher une unité aux régionales : « je souhaite une candidature unique pour les régionales, si possible avant le 1er tour (…) pour la présidentielle, ça serait évidemment aussi l’idéal, et je souhaite que la réunion organisée par Yannick Jadot le 17 avril y contribue ».

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Najat Vallaud-Belkacem, ancienne ministre de Ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche durant le quinquennat de François Hollande dénonce la manière dont a été supprimée l’ENA : « c’est une forme de populisme d’annoncer ainsi la suppression de l’ENA sans rien dire des nouvelles modalités de recrutement de la haute fonction publique ». Si elle semble en accord avec les critiques affirmant que l’ENA fabrique des élites déconnectées du peuple, une telle école garantissait selon elle une certaine compétence des hauts-fonctionnaires : « je ne dis pas que l’ENA était parfaite, je suis la première à plaider pour plus de diversification sociale, mais avez vous entendu quelque chose qui vous rassure pour la suite ? J’ai le sentiment qu’on va un peu vite en besogne et qu’on essaie de donner des gages à l’opinion publique (…) on essaie peut-être aussi d’installer une verticalité du pouvoir pour ne pas avoir de hauts-fonctionnaires qui pourraient gêner à l’exercice du pouvoir (…) quelque chose n’est pas net dans la gestion de l’affaire ENA (…) l’ENA a été conçu comme une garantie à une administration de qualité et compétente, on a besoin de cela, ce qui lui manquait sans doute était cette capacité à entendre davantage le pays ».

Rémi Monti

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