Après le premier tour de l’élection présidentielle, et la qualification d’Emmanuel Macron et Marine Le Pen pour le second tour, les éditorialistes annoncent la recomposition de la vie politique. Emmanuel Macron est accusé d’avoir hâté le phénomène.
Le PS et LR sont blessés à mort, selon Nicolas Beytout de L’Opinion
« Recomposition » c’est le mot qu’emploie Jean-Michel Salvator du Parisien-Aujourd’hui en France. Pour lui « c’est bien le clivage Le Pen-Macron qui structure la vie politique française, avec un troisième pôle, celui de la France insoumise qui jouera un rôle pivot dans la reconstruction de la gauche ». Pour Jérôme Chapuis de La Croix, « un clivage s’installe : jamais le vote protestataire n’a été aussi élevé. L’affiche du 2ème tour est la même qu’en 2017 mais l’humeur des Français a changé. Pour les formations politiques traditionnelles, si 2017 était l’année de la déroute, 2022 est celle de la faillite. L’écologie, enjeu majeur de la décennie n’a même pas profité à Yannick Jadot. La recomposition de 2017 va se poursuivre sur des bases qui ne sont pas sans risques pour la démocratie ». Pour Nicolas Beytout de L’Opinion, ce premier tour de scrutin a effacé 50 ans de politique française et le PS et les Républicains sont blessés à mort.
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Une droite et une gauche plus dure se partagent désormais avec le centre d’Emmanuel Macron l’essentiel de l’expression démocratique. C’est ce que Cécile Cornudet appelle dans Les Echos « trois candidats et le désert français ». Elle décrit trois blocs politiques : un centre et deux extrêmes structurent – à moins qu’ils ne le caricaturent – le paysage politique français. C’est la recomposition saison 2. Pour Ouest France Stéphane Vernay estime que « le triple vote utile ne dit rien de l’issue du second tour, le 24 avril. Les sondeurs n’ont cessé d’affirmer que les Français ne voulaient pas d’un match retour Macron-Le Pen, il va pourtant se jouer mais dans un contexte de crises inédites, quant aux finalistes, ils ne sont plus les mêmes. Le paysage politique vient de se recomposer brutalement sous nos yeux ».
Emmanuel Macron a-t-il trop d’avance pour être rattrapé par Marine Le Pen au second tour ?
Dov Alfon de Libération accuse Emmanuel Macron d’avoir hâté cette recomposition et fait monter l’extrême droite à son profit sans jamais mettre en cause la gauche incapable de s’unir : « pour avoir face à lui la candidate qu’il a battue en 2017, Macron aura contribué plus que tout président avant lui à la normalisation du discours d’extrême droite secondé par un ministre de l’Intérieur trouvant Marine Le Pen trop molle et un ministre de l’Education nationale pourchassant ses lubies réactionnaires jusque dans les facs. Préférant toujours utiliser le palais de l’Elysée pour flatter un Raoult, discuter avec un Zemmour, dîner aujourd’hui d’un gibier avec un chasseur ou se pavaner avec un Villiers, le président a fait un calcul cynique et risqué pour un second tour qui s’annonce bien plus risqué que le précédent ». Ce n’est pas l’avis d’Alexis Brézet dans Le Figaro.
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Pour lui Macron a trop d’avance pour être rattrapé par Marine le Pen au second tour même si elle est dédiabolisée, même si elle réussit le débat qu’elle avait raté en 2017. N’empêche, une fois élu Emmanuel Macron devra faire face à un bloc d’hostilités sociales dont les clameurs ne vont pas cesser de retentir. Il lui faut enfin entrer en campagne, ne pas tenter de séduire la gauche car il n’y a plus grand monde à séduire mais se lancer dans la bataille, non pas à moitié ou à reculons. Puisque pour lui tout recommence, il doit reprendre les choses là où il les a laissées. C’est-à-dire au commencement. Voilà ce que dit la presse au lendemain de ce 1er tour. Si elle l’avait dit en musique, elle aurait souligné que le flop de la symphonie pastorale de Yannick Jadot, le tragique des requiems interprétés par Valérie Pécresse et Anne Hidalgo, elle aurait noté qu’Eric Zemmour a rejoint les chœurs de l’hymne national entonné par Marine Le Pen. La presse aurait également salué la symphonie inachevée un peu surjouée de Jean-Luc Mélenchon. Quant à Emmanuel Macron il faudra qu’il sans doute sa symphonie du nouveau monde pour séduire les mélomanes.
David Abiker