Brice Teinturier, directeur général délégué de l’Institut Ipsos, était l’invité de Renaud Blanc sur Radio Classique, ce lundi 16 mai. Il souligne que ce second quinquennat d’Emmanuel Macron doit avoir une dimension réformatrice, et que le profil du prochain Premier ministre devra correspondre à « cette double exigence de l’action et de la réforme ».
Brice Teinturier : Le prochain Premier ministre devra être « politique »
Qu’est-ce qui va rester du passage de Jean Castex à Matignon pour vous ?
Je crois qu’il va rester de lui une trace positive : il a été un Premier ministre perçu comme proche des territoires, proche des Français, loyal à son président. Les Français détestent en réalité quand il y a des tensions au sein du couple exécutif. Certes, il n’y a pas de grandes mesures qui ont été prises, de grandes réformes sous ce quinquennat, mais malgré tout, il y a eu la crise Covid et il a été perçu comme quelqu’un qui a bien géré les choses, qui a informé les Français.
Nommé en juillet 2020, il n’était pas un Premier ministre très politique, c’était plutôt un collaborateur, là pour véritablement seconder le chef de l’État ?
Oui, totalement, et les Français ont bien compris qu’il n’y a en réalité qu’un seul patron, le président de la République. Jean Castex, a vraiment capitalisé sur la dimension « je suis au service des Français », « je mets en application dans une période difficile la politique décidée par le président de la République ».
Les législatives auront lieu dans un mois, il faudra que le prochain Premier ministre sache mener campagne ?
C’est évidemment préférable. Mais au-delà des législatives, il y a vraiment la question de la dimension de ce quinquennat. Que va faire Emmanuel Macron de ces 5 années supplémentaires ? Un certain nombre d’éléments le poussent à réformer le pays, qui est toujours, on le sait, instable et inflammable. Il lui faut un Premier ministre « politique », au sens de quelqu’un qui puisse répondre à cette double exigence, à la fois de réformer et en même temps éviter de mettre le pays à feu et à sac.
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Ce temps est particulièrement long, à l’issue d’un scrutin et d’une campagne qui a été un peu amortie, prise en étau à la fois par la pandémie et par l’Ukraine. Le profil du prochain chef de gouvernement devra satisfaire à cette double exigence de l’action et de la réforme. Si c’était un 2e quinquennat pour rien, évidemment, ce serait un ratage total. Il faut donc de l’action, de la transformation, de la réforme d’un côté, mais en même temps des équilibres politiques.
Vous vous attendez à ce qu’il nomme une femme ?
Très sincèrement, je ne sais pas. Ce serait un plus, bien évidemment, mais je pense que les considérations d’équilibre politique doivent primer sur cette considération du genre. S’il arrive à avoir les deux, c’est évidemment bien, mais c’est avant tout la capacité politique d’entraînement du pays qui me paraît essentielle.
« On aurait tort de minorer la demande de leadership des Français »
Si je comprends bien, ça serait plutôt à gauche qu’il faudrait chercher.
Je crois qu’il faut que ce soit effectivement au centre gauche pour rééquilibrer et envoyer un signe, à fortiori avant les législatives.
François Bayrou, dont le MoDem a scellé une alliance avec LREM et le mouvement Horizons d’Edouard Philippe, réclame du leadership, de l’expérience et de l’empathie.
Cette demande de leadership reste très présente. Elle est incarnée évidemment par Emmanuel Macron. Les Français ont vraiment besoin d’un exécutif qui sache conduire les réformes et tracer l’horizon. Ça ne veut pas dire qu’il s’y rallient évidemment, mais on aurait tort de minorer cette demande de leadership.