Quelles consignes donner pour la majorité en cas d’affrontement au deuxième tour des législatives entre la Nupes et le Rassemblement National ? Si le camp d’Emmanuel Macron a maintenu le flou dans un premier temps, il semblerait qu’il favorise un barrage à l’extrême droite, quand bien même une grande partie de ses combats se jouera contre l’alliance de gauche.
Emmanuel Macron aimerait bien que se mette en place un « front républicain » contre Jean-Luc Mélenchon
La majorité a semblé hésiter sur la position à adopter en cas de second tour entre la Nupes et le RN. En effet, le choix d’Ensemble ne semble pas très clair et rappelle une phrase attribuée à Edgar Faure : « si vous m’avez compris, c’est que je me suis mal exprimé ». Les macronistes se sont tellement exprimés qu’on a du mal à comprendre leur position. On a plutôt très bien compris qu’ils étaient dans l’embarras. Ils sont dans l’embarras parce que le chef de l’Etat est toujours sur une ligne de front républicain sans condition à l’égard du Rassemblement national. Lui et les siens ne se privaient pas d’en faire une arme contre la droite ou contre Mélenchon.
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Il accusait ses opposants de n’être pas assez clairs contre le parti lepéniste. Quand Mélenchon répétait « pas une voix pour Le Pen », il trouvait qu’il n’en faisait pas assez et aurait évidemment préféré que tout le monde dise : « votez Macron ». Mais voilà, cette fois, c’est lui qui affronte une autre menace, d’un autre extrême, celui de la gauche passée sous la coupe de Mélenchon. De plus c’est sa majorité qui se joue. Alors il aimerait bien que se mette en place une autre forme de « front républicain ». Autrement dit, que tout le monde vote pour ses candidats pour faire barrage au mélenchonisme.
La majorité s’est créée un problème insoluble qu’elle aurait pu s’éviter
Pour autant le conseil de vote de la majorité semble ne pas complètement exclure la Nupes. En effet, depuis quatre décennies la label officiel « parti non républicain » est réservé au seul RN. Quiconque oserait dire que ce qui se passe du côté des Insoumis pose des questions est aussitôt accusé de banaliser le péril brun. Ainsi, la position de la majorité a fluctué entre la veille du premier tour, le soir du premier tour et le lendemain du premier tour. Elle a d’abord été de dire non à tous les extrêmes. Cette position a même été exprimée par la porte-parole Olivia Grégoire. Puis, ils se sont ravisés en certifiant que leur priorité restait de faire barrage à l’extrême droite quitte à voter pour la Nupes. Enfin, une ligne quasi officielle s’est dessinée qui consiste à ne jamais donner une voix pour le FN et à dire oui au front républicain en faveur de la gauche, mais seulement lorsque le candidat de la Nupes est acceptable et qu’il n’est pas sur une ligne trop floue face à l’islamisme et trop hostile à la police. C’est un mélange de position de principe et de mise en œuvre à la carte.
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Pourtant la configuration d’un second tour entre la Nupes et RN est assez rare. On a donc l’impression que la majorité s’est elle-même créée un problème insoluble qu’elle aurait pu s’éviter. En effet, dans 1 circonscription sur 2 l’opposition sera entre Ensemble et la Nupes. Donc le besoin électoral vital pour la majorité est de mobiliser contre les mélenchonistes et non pas d’expliquer qu’on est prêt à voter pour eux pour conjurer une menace lepéniste qui n’existe pas. Selon toutes vraisemblances le RN aura 20, 30 ou au plus 40 députés. De plus, il y a moins de 60 duels entre la Nupes et le RN , soit 1 cas sur 10 seulement. En s’infligeant le supplice tactique habituel du « front républicain », Ensemble s’affaiblit dans son combat national. En s’attaquant à un ennemi inoffensif sur le plan électoral, la coalition macroniste fait les affaires d’un ennemi autrement plus dangereux pour elle, et qui n’est pas plus rassurant pour le pays.
Guillaume Tabard
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