La Première ministre Elisabeth Borne va prononcer cet après-midi, à l’Assemblée nationale, son discours de politique générale. Au regard de la nouvelle configuration du parlement, elle a l’occasion de présenter un discours qui peut laisser une trace dans la vie politique française et permettre l’éclaircissement du projet présidentiel.
Le discours de politique générale, c’est souvent beaucoup d’attente pour beaucoup de déception
C’est le grand jour pour Elisabeth Borne. La Première ministre joue gros avec ce discours de politique générale. En raison du côté grand oral et solennel de l’exercice, on répète l’importance de ce discours à chaque fois, pour chaque Premier ministre. Pourtant, il faut tout de même prendre du recul. En effet, quel discours de politique générale a réellement laissé des traces dans la vie politique ? On cite toujours le discours de la Nouvelle société de Jacques Chaban-Delmas en 1969 car ce fut plus la vision d’un président que la feuille de route d’un Premier ministre. Cela avait d’ailleurs agacé Georges Pompidou, le président de l’époque. Mais sinon, c’est un peu toujours pareil. C’est-à-dire beaucoup d’attente, de mise en scène préparatoire avant, et beaucoup de déception après.
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On verra si cela se confirme cet après-midi même si c’est un peu inévitable pour deux raisons. La première est que chacun prend ses marques. Les députés sont pour la moitié des nouveaux et le Premier ministre ne sait pas encore comment réagit l’Assemblée qui est devant eux. Plusieurs députés ont confié que « cela donne à l’exercice un côté formel et intimidant ». La seconde raison est le genre littéraire et hybride de ce discours. Si le Premier ministre fait dans les généralités, on est déçu car il n’y a pas d’annonces. On proteste alors qu’il a oublié de parler de ceci ou de cela. Si au contraire, il est exhaustif dans les thèmes de la vie gouvernementale, on dit que c’est un catalogue ou que ça manque de souffle. Le discours de politique générale, c’est donc un peu mission impossible.
Elisabeth Borne doit prononcer cet après-midi un véritable discours de la méthode
Paradoxalement, Elisabeth Borne a deux chances de répondre plus que ses prédécesseurs à une attente des parlementaires et même des Français. La première est un cadeau, peut-être involontaire, fait par Emmanuel Macron. En général après des législatives organisées dans la foulée de la présidentielle, le Premier ministre ne fait au fond que répéter le projet présenté par le président élu durant sa campagne. C’est ce qu’on fait Jean-Pierre Raffarin, François Fillon, Jean-Marc Ayrault, et Edouard Philippe après les victoires de Chirac, Sarkozy, Hollande et Macron.
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Pourtant cette fois-ci, le moins que l’on puisse dire, c’est que le projet 2022 du même Macron n’a pas brillé par sa clarté. Il a vaguement listé quelques thèmes, comme la transition écologique, l’école et l’hôpital, mais il n’a pas présenté de réformes précises. En général, le discours de politique générale est un exercice de répétition, pourtant cette fois c’est un travail d’explication qui est attendu. Sa seconde chance est la configuration de la nouvelle assemblée. Désormais on sait qu’il n’y aura ni coalition ni élargissement de la majorité. Il faut donc bien dire comment avancer, de manière concrète, ou comment construire le parcours parlementaire avec les groupes d’opposition. Autrement dit, bien plus que pour ses prédécesseurs, on attend d’Elisabeth Borne qu’elle prononce cet après-midi un véritable discours de la méthode.
Guillaume Tabard