Abstention aux régionales : Michel Onfray évoque « la mort de la démocratie indirecte »

Michel Onfray était l’invité de la matinale de David Abiker ce vendredi 25 juin. Le philosophe a évoqué l’abstention record des élections régionales qu’il explique par la prise de conscience du peuple que son vote était méprisé par des élites politiques.

Michel Onfray : « En 2005 on a fait savoir au peuple que son vote était mis à la poubelle »

Michel Onfray porte un regard critique sur les commentaires faits autour du taux record d’abstention aux élections régionales. Pour beaucoup, cette non participation appelle à un changement d’institution et de nouvelles mesures pour inciter les français à voter : « Tout le monde est en train de commenter la même chose, que ce soit les journaux de droite comme de gauche, je lisais un professeur de polytechnique dans Libération qui appelait à changer les institutions : formidable ! » déclare satiriquement Michel Onfray. Selon lui, le peuple ne va tout simplement plus voter parce qu’il a été trahi par ses élites politiques : « On a fait savoir au peuple en 2005 que quand il votait on mettait son vote à la poubelle. L’Assemblée Nationale et le Sénat se sont débrouillés pour voyer contre le peuple ».

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Pour le fondateur de l’Université populaire de Caen et le Girondin affirmé qu’il est, la participation par le vote et l’élection d’un élu n’est pas l’horizon indépassable de la politique : « ma gauche est girondine, c’est à dire qu’elle est vraiment démocratique, elle parle directement au peuple (…) La gauche réside dans le fait que des paysans s’associent pour faire des coopératives, des mutualisations, que des gens sur le marché proposent des circuits-courts, d’autres façon de pêcher (…) Les formes alternatives, c’est ça le génie français, et là se trouve la gauche qui a mon estime ». Sa vision d’une France passe par un abandon de la politique telle qu’on la connaît aujourd’hui : « je défend un communalisme libertaire, des parlements régionaux, je défend la possibilité de faire de la politique autrement (…) l’abstention des régionales est la mort de la démocratie indirecte, les gens ne veulent plus un élu qui parle pour eux ».

 

Michel Onfray : « Ce qui distingue Juppé, Hollande et Macron du point de vue idéologique ? Rien du tout »

Marine Le Pen a répété les appels au vote d’entre deux tours des régionales suite au revers infligé au Rassemblement National dans les urnes. En rappelant ses électeur au devoir de voter, Michel Onfray y voit une manière pour Marine Le Pen de ne pas se remettre directement en cause malgré le revirement idéologique du RN ces dernières années : « Le RN est devenu le RPR des années 1970, et elle dit ne plus vouloir toucher à l’Euro et à Schengen (…) Les électeurs se disent qu’elle est Xavier Bertrand ». Pourtant, le reste de l’échiquier politique semble toujours prêt à faire bloc face au RN, ce qui est le signe de l’unité idéologique de ces autres formations politiques, selon Michel Onfray : « La gauche Maastrichtienne et la droite c’est la même chose, qu’est-ce qui distingue Juppé, Hollande et Macron d’un point de vue idéologique ? Rien du tout (…) après on remarque effectivement une autre gauche, qu’on pourrait appeler extrême gauche comme on dit extrême droite ne manière inappropriée, en disant que Mélenchon est d’une extrême-gauche islamo-gauchiste, et qu’il y a également dans le Parti Socialiste ou chez EELV beaucoup d’islamo-gauchistes (…) mais les gens ont compris que cet islamo-gauchisme était dangereux pour la République, probablement plus dangereux que d’autres partis dont on dit qu’ils sont anti-démocratiques comme le RN ».

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Si Marine Le Pen a fait très largement évoluer le Rassemblement National, en l’amenant bien loin du style et des idées de Jean-Marie Le Pen, cela a été historiquement le cas de toutes les formations politiques : « Tout le monde a évolué, le Parti Communiste défendait le pacte germano-soviétique (…) Mitterrand disait que qui ne veut pas rompre avec le capitalisme ne peut être socialiste (…) Le RPR avait en son temps d’immenses portraits du Général De Gaulle et des croix de Lorraine (…) Tous ces gens ont voté oui à Maastricht et bradé la souveraineté de la nation, tous ces gens là ont eu le droit de changer ». Selon Michel Onfray, la diabolisation dont fait toujours l’objet Marine Le Pen représente bien la pauvreté des idées des politiques en place face à elle : « Marine Le Pen changeant complètement le parti de son père, en arrivant même à estimer que l’Islam est compatible avec la République et que Zemmour est d’extrême-droite, on lui fait tout de même des procès d’intention, on a plus que ça à lui opposer ».

Rémi Monti

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