KLEIBER Carlos

(1930-2004) Chef d'orchestre

La personnalité flamboyante de Carlos Kleiber et son talent d’analyste de la musique en ont fait un chef d’orchestre atypique, ne se fixant nulle part mais exigeant des orchestres qui lui étaient confiés un nombre impressionnant de répétitions. Ses enregistrements légendaires des symphonies de Beethoven, Schubert et Brahms et des grands opéras du répertoire le placent au rang des plus grands interprètes de la seconde moitié du XXème siècle.

Carlos Kleiber en 10 dates :

  • 1930 : Naissance à Berlin
  • 1935 : Départ pour l’Argentine
  • 1954 : Débuts de chef d’orchestre à Potsdam
  • 1966 : Kappelmeister à Stuttgart
  • 1974 : Tristan et Isolde à Bayreuth
  • 1979 : Le Chevalier à la rose à Munich
  • 1988 : Début au Met de New York dans La Bohème
  • 1989 : Concert du Nouvel An au Musikverein de Vienne
  • 1999 : Dernier concert avec l’Orchestre symphonique de la radio bavaroise
  • 2004 : Mort à Konjsica (Slovénie)

Fils du chef d’orchestre autrichien Erich Kleiber, il passe sa jeunesse en Argentine puis revient en Allemagne après la guerre.

Né à Berlin trois ans avant l’arrivée au pouvoir des nazis, alors que son père est directeur musical du Staatsoper, il part en Argentine avec sa famille en 1935 et ne reviendra en Europe qu’après la guerre. Le jeune Karl devient Carlos, apprend le piano et les timbales. Son père tente de le dissuader de s’engager dans des études musicales. Mais ce sera en vain.

Les études de chimie ne le passionnent guère et, sans formation académique, il s’engage dans une carrière musicale en acceptant des postes de répétiteur dans des théâtres d’opéra. A Munich d’abord, puis à Vienne. Ses débuts de chef d’orchestre ont lieu à Potsdam, dans la banlieue de Berlin, pour une opérette. En 1958, il prend le poste de chef de chant à l’opéra de Düsseldorf. En 1966 il est nommé Kapellmeister à Stuttgart, puis est invité à diriger l’Orchestre de l’Opéra d’Etat de Bavière, qui deviendra son port d’attache. Il établit alors sa résidence à Munich. Ce n’est qu’en 1973 qu’il est appelé à l’Opéra de Vienne pour diriger Tristan, et sa carrière décolle. Deutsche Grammophon lui fait enregistrer Le Freischütz avec la Staatskapelle de Dresde, qui lui vaut les louanges de la presse – même s’il refuse déjà de répondre aux interviews. Il fait des débuts fracassants en 1974 à Bayreuth, puis à Covent Garden et à la Scala.

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Les années 1980 voient Carlos Kleiber accéder au statut de star internationale.

En 1980, il enregistre à Dresde un Tristan et Isolde qui restera l’une des versions les plus admirées, avec Margaret Price qui pourtant ne l’a jamais chanté sur scène, et René Kollo. Le ténor allemand se vit sérieusement rabroué par Kleiber, au point que celui-ci finit par quitter le studio d’enregistrement, après un nombre incalculable de répétitions.

Les concerts s’enchaînent, des deux côtés de l’Atlantique. Après une Traviata à Florence en 1985, on le voit au Met de New York pour La Bohème en 1988 avec Pavarotti et Mirella Freni, puis en 1989 à Vienne pour le concert du Nouvel An. Il y a cependant une ville qu’il n’a jamais honorée de sa présence : Paris !

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A la mort de Karajan, il décline sa succession à Berlin.

Lorsque survient le décès de Karajan en 1989, tout le monde pense que Kleiber lui succédera. Les deux géants s’appréciaient et rien ne semblait pouvoir contrarier cette succession. Sauf le caractère farouchement indépendant de Carlos, fidèle à son parcours solitaire et réfractaire aux institutions. Il ne veut pas s’engager dans un poste fixe, aussi prestigieux soit-il.

L’Ouverture de La Chauve-Souris de Johann Strauss (Concert du Nouvel An 1989)

 

L’ombre de son père plane toute sa vie sur sa carrière. Le Chevalier à la rose est l’opéra qu’il a le plus dirigé, plus de cent fois, mais il ne l’a pas enregistré en studio, de même pour Wozzeck. Car son père l’avait fait avant lui. En revanche, il reprend ses indications pour les symphonies de Beethoven, du moins pour celles qu’il joue (4, 5, 6 et 7), car il n’a jamais dirigé les autres.

 

Carlos Kleiber donne son dernier concert en 1999 puis se retire définitivement.

L’élégance de la gestuelle de Carlos Kleiber n’est pas pour rien dans son charisme. Il utilise ses deux bras dans des mouvements très larges, enveloppants, et son sourire montre souvent le bonheur qu’il éprouve, comme au début de la 4ème Symphonie de Beethoven. Il y a chez lui un amour de la musique qu’il ne dissimule pas derrière une sévérité souvent affichée par les chefs d’orchestre. Et son perfectionnisme n’exclut pas l’humour. Il répond à son confrère roumain Celibidache, réputé pour son mauvais caractère et qui avait critiqué Karajan, en lui adressant un télégramme humoristique et posthume de Toscanini au nom de tous ses illustres confrères du Ciel, admirateurs et solidaires de Karajan.

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Malade depuis la fin des années 1990, Carlos Kleiber met fin à ses concerts après une ultime prestation à Cagliari en février 1999, et se retire discrètement auprès de son épouse slovène. Il décède le 13 juillet 2004, sept mois après elle. Nul doute qu’il a rejoint Toscanini et Karajan, et bien sûr son père Erich Kleiber, qui ne doit pas lui en vouloir de n’être pas devenu chimiste !

 

Philippe Hussenot

 

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