David Martinon, ambassadeur en Afghanistan : « 5 secondes pour vous en sortir, il faut être capable de se débrouiller seul »

Cette semaine dans Secrets de dirigeants, nous vous proposons un témoignage rare, celui de David Martinon, ambassadeur de France en Afghanistan, toujours en poste mais depuis Paris. En août dernier, il a organisé avec ses équipes en quelques jours, l’exfiltration de 2805 personnes, avant de quitter le pays, après la prise de la capitale par les Talibans. Une vie bien loin des ors de la République sous lesquels on imagine généralement un ambassadeur et qu’il raconte dans un livre Les 15 jours qui ont fait basculer Kaboul aux Editions de l’Observatoire.

Pour l’ambassadeur à Kaboul, les rares sorties se font sous escorte du RAID

Ce poste d’ambassadeur en Afghanistan, David Martinon s’est battu pour l’avoir. Après une première carrière en politique aux côtés de Nicolas Sarkozy, il est revenu à son corps d’origine, le ministère des Affaires étrangères. Son premier poste, consul à Los Angeles, lui avait fait goûter à une vie plutôt confortable, bien loin de celle qu’il a connu à Kaboul. Un poste tellement dangereux qu’on y vient sans sa famille et dont on dit qu’il est l’un des mieux payés du Quai d’Orsay. Une vie sous contraintes où l’on travaille avec son gilet pare-balles et son casque lourd près du bureau ou de son lit, et où les rares sorties se font sous escorte du RAID.

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En août 2021, juste avant que les occidentaux ne quittent Kaboul, avec ses équipes, repliées sur l’aéroport, il s’est transformé en logisticien pour récupérer, parfois un par un (dans une foule de plusieurs dizaines de milliers de personnes) des « invités de la France » comme il les appelle. Un tour de force incroyable réussi dans des conditions peu ordinaires où tout change parfois en quelques minutes, et où la mort rôde en permanence, pire que dans le pire film de guerre. Ce miracle a été rendu possible grâce au savoir-faire et à l’énergie des équipes du RAID, aux militaires, aux policiers, aux agents de la DGSE et bien sûr aux diplomates. Au total une centaine de personnes dont on ne connaît ni le nom ni le visage, pour les protéger dans leurs futures activités. On comprend d’ailleurs qu’il est impossible de raconter certaines choses. Ce qui s’est passé à Kaboul est resté à Kaboul.

 

La France n’est pas prête à rouvrir son ambassade à Kaboul

Dans ce podcast, David Martinon nous explique comment il a géré en urgence ce rapatriement hors norme. Comment, avec ses équipes, il s’était préparé à quitter l’Afghanistan, que c’est ce mélange d’organisation, de courage et d’expérience qui lui permis de ramener tout le monde à la maison et que c’est une extraordinaire aventure humaine. Il nous explique aussi comment on ferme une ambassade et comment les familles restées en France vivent la situation. Enfin il nous explique aussi, pourquoi, la France n’est pas prête de rouvrir son ambassade à Kaboul. Lui devrait bientôt recevoir une nouvelle affectation, dans un endroit plus calme. Il l’a promis à sa famille.

Les phrases-clés de David Martinon

En arrivant à Kaboul, il s’est mis à suivre le même entraînement physique que les agents du RAID, les policiers et les militaires. « Je ne voulais pas être un poids pour les gens chargés de ma sécurité. Si vous avez 5 secondes pour vous en sortir, il faut être capable de se débrouiller soi-même. Sinon vous y restez. »

« Nous avions besoin d’une très grande cohésion. Et comme il n’y a rien à faire à part travailler, il nous restait le sport. Et c’était très important.»

« J’ai écrit ce livre pour rendre hommage à tous les membres de cette équipe. Dans le livre ce sont des prénoms, des noms de code radio. Les espions, les soldats du commandement des opérations spéciales CPA10 et les policiers, en particulier ceux du RAID, doivent absolument rester anonymes pour pouvoir continuer à travailler, sereinement. »

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