Fin du broyage des poussins : la filière dénonce un risque pour la compétitivité

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C’était une mesure réclamée depuis de nombreuses années par les associations de défense du bien-être animal : le broyage des poussins mâles est désormais interdit en France. La filière a jusqu’à la fin de l’année pour s’adapter.

Les machines d’ovosexage devront fonctionner au plus tard le 31 décembre prochain

Le décret a été publié hier, le 6 février. Jusque-là, 50 millions de poussins mâles étaient broyés ou gazés chaque année en France car ce n’était pas rentable de les nourrir. Les poussins mâles ne sont pas faits pour la viande dans cette filière des poules pondeuses. Selon Etienne Gangneron, agriculteur et vice-président de la FNSEA : « les souches qui sont sélectionnées depuis très longtemps pour faire des œufs ne sont pas des souches destinées à faire de la viande. Les mâles n’ont pas de valorisation économique puisque par définition et par nature, ils ne font pas d’œufs ni de viande. C’est pour cela que cette pratique de ne garder que les poussins femelles a été mise en place ».

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5 couvoirs spécialisés dans la fourniture de poules pondeuses aux éleveurs sont concernés en France par cette interdiction. Ils vont devoir déployer désormais une nouvelle technique. Celle de l’ovosexage, des machines qui permettent de déterminer le sexe des embryons dans l’œuf et donc d’éliminer les mâles avant même leur éclosion. Ces matériels devront fonctionner au plus tard le 31 décembre prochain. Un délai très court compte tenu du déploiement complexe de cette nouvelle technologie selon Etienne Gangneron : « on n’a pas l’assurance formelle que le résultat sera aussi probant. La technique n’est pas 100% au point. Il y a des fois ou cela ne marchera pas et on ne sait pas si cela va marcher sur des grandes cadences avec des volumes importants. En fait, les grands couvoirs français vont mettre en œuvre cette technique sur tous les œufs ».

Le broyage des poussins mâles est toujours possible pour le marché spécifique de l’alimentation animale

La filière pointe du doigt également le surcoût associé à cette mesure. Lié d’abord à l’investissement dans ces nouveaux matériels puis au fonctionnement. Un surcoût estimé par la filière à 64 millions d’euros par an soit 1 à 2 centimes supplémentaires sur une boite de 6 œufs : « si le consommateur refuse de payer le surcoût et que ce même consommateur va acheter des œufs qui viennent d’autres pays d’Europe ou d’ailleurs, parce que ce sont des pays ou l’on tue encore les poussins mâles, les couvoirs français fermeront car ils seront réduits à néant en termes de compétitivité par ces autres pays ».

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L’interdiction est effective également depuis le début de l’année en Allemagne mais pas ailleurs en Europe selon la FNSEA. Du côté des associations de défense du bien être animal, on salue évidemment la publication de ce décret très attendu. Mais le texte aurait pu être plus ambitieux selon Léopoldine Charbonneaux, directrice de l’ONG CIWF qui regrette que l’ovosexage intervienne au plus tard au 15ème jour de l’incubation : « en tant qu’association de défense du bien-être animal, on recommande une intervention de sexage qui intervienne le plus tôt possible. 15 jours c’est tard, il y a une zone grise du 7ème au 14ème jour sur l’éventuelle douleur que peut sentir l’embryon. Avant 7 jours on sait qu’il n’y a pas de douleur mais à partir du 7ème jour on ne sait pas. Par principe de précaution nous pensons que devrait être acté dans la loi, un objectif avant le 7ème jour ». L’ONG regrette également que le broyage des poussins mâles soit toujours possible pour le marché spécifique de l’alimentation animale. Les couvoirs ont jusqu’au premier mars pour prouver qu’ils ont bien commandé des matériels d’ovosexage.

Baptiste Gaborit 

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