Renault-Nissan-Mitsubishi : L’alliance se réunit autour de l’électrique et affiche un nouvel état d’esprit

Renault et ses partenaires japonais Nissan et Mitsubishi annoncent aujourd’hui une nouvelle étape dans leur Alliance, et c’est un moment important. Ils ont dévoilé un plan de 23 milliards d’euros d’investissement sur cinq ans, ils comptent proposer 35 nouveaux véhicules 100% électriques en 2030.

Carlos Ghosn a redressé Nissan en un temps record au début des années 2000

L’histoire entre Renault et Nissan a toujours été compliquée, je l’ai vécue en direct il y a plus de 20 ans quand j’étais correspondant au Japon et ça reste pour moi un cas d’école incroyable. Il faut se souvenir qu’en 1999, Nissan est en quasi-faillite. Le groupe a besoin urgent d’un partenaire industriel et financier, et il rêve alors de se marier avec le prestigieux Daimler, qui fabrique des Mercedes. Mais au dernier moment l’Allemand renonce et le Japonais accepte un mariage par défaut avec Renault. Au début, personne ne croyait à cette alliance mais Nissan va être redressé en un temps record par Carlos Ghosn. Tout ira bien jusque 2015. A ce moment-là, Carlos Ghosn, qui a pris la direction également de Renault est victime d’une forme de folie des grandeurs.

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Il veut absolument devenir numéro un mondial en produisant dix millions de voitures par an. Mais la course aux volumes s’avère désastreuse et Nissan en arrive à ne plus respecter son partenaire et actionnaire Renault. C’est ce qui conduira à l’arrestation de Ghosn en 2018. Et à l’époque on se dit que l’Alliance va voler en éclats. Renault, Nissan, et depuis Mitsubishi qui a rejoint l’Alliance, forment une sorte de vieux couple. Ils ne s’aimaient plus, ils se sont demandés s’ils allaient divorcer et ils ont en fait conclu une forme de mariage de raison. Les annonces d’aujourd’hui vont dans ce sens. Ils vont partager plus de technologies, ils vont mutualiser plus d’investissements et Renault va par exemple produire en France des voitures de ses partenaires japonais. C’est symbolique mais ça prouve aussi qu’ils voient un intérêt à travailler ensemble. C’est la preuve, je trouve, d’un nouvel état d’esprit.

Renault Nissan et Mitsubishi devaient se rapprocher pour affronter la révolution de l’électrique et de l’intelligence embarquée

Leurs destins sont liés. L’automobile est au milieu d’une double révolution. A la fois l’électrique et l’intelligence embarquée. Une voiture devient comme un smartphone. Des roues avec du logiciel et des batteries. Pour financer cette révolution, il faut des milliards. Et seuls, ni Renault, ni Nissan ne peuvent se le permettre car il faut dépenser beaucoup et très vite. Si les constructeurs ne s’étaient pas rapprochés, il y avait un risque de divergence. Chacun aurait investi seul dans son coin, il n’y aurait plus eu d’économies d’échelle, et progressivement ils auraient suivis des routes de moins en moins parallèles. Aujourd’hui, ce n’est pas le retour du grand amour mais c’est quand même le signe qu’on sort d’une forme de Guerre froide franco-japonaise. On va maintenant devoir reconstruire ensemble en temps de paix.

David Barroux

 

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