Clément Beaune, le ministre des Transports a appelé les sociétés autoroutières à baisser leurs tarifs afin de permettre aux Français de partir plus sereinement en vacances. Si Vinci autoroutes a fait un geste qui comporte des conditions préalables, le gouvernement sait qu’il n’a pas le pouvoir de dicter les prix exercés par les principaux exploitants.
Le gouvernement n’a aucun moyen d’imposer une ristourne aux exploitants autoroutiers
Le gouvernement veut un geste de la part des sociétés d’autoroutes sur les tarifs des péages. Il faut savoir que l’Etat n’a aucun moyen d’imposer cette ristourne car il n’a pas la main sur les tarifs des autoroutes. En fait les sociétés d’autoroutes elles-mêmes n’ont pas vraiment la main dessus. Les tarifs évoluent chaque année, au 1er février, selon des règles qui ne bougent pas. Il y a donc 2 éléments qui peuvent provoquer la hausse des tarifs. Le premier c’est l’inflation qui est répercutée à 70%. Il est donc facile d’affirmer que les tarifs des péages vont augmenter à nouveau en février 2023, d’au moins 3,5 ou 4%. Le coût des travaux réalisés sur le réseau sont également pris en compte. Tout cela est fixé par décret et par les contrats de concession.
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Alors, le gouvernement sait parfaitement qu’il ne peut pas imposer de ristourne. Emmanuel Macron lui-même s’en souvient bien. En effet, si l’on revient quelques années en arrière quand Ségolène Royal était ministre de l’Ecologie de François Hollande, on se rappelle que la ministre avait tenté d’imposer un gel des tarifs. Ce coup politique sera ensuite cassé par le Conseil d’Etat. Il faudra même rattraper progressivement la hausse qui était prévue, en augmentant davantage les tarifs les années suivantes. Emmanuel Macron était alors le collègue de Ségolène Royal, et avait dû négocier avec les sociétés d’autoroutes.
La France a un réseau autoroutier de luxe et les prix vont avec
Cela nous ramène au débat sur les autoroutes et les conditions dans lesquelles elles ont été concédées. Contrairement à ce qu’on entend souvent, l’Etat ne les a pas vendues. Ce sont en fait des concessions. C’est donc temporaire et la France reste propriétaire. Pourtant, le gouvernement a tellement mal écrit ou négocié les contrats à l’époque, qu’il se retrouve à avoir chez lui des acteurs indélogeables et jugés trop chers mais qui sont dans leur bon droit. En résumé, c’est un peu comme si le bouclier tarifaire existait sur les autoroutes, non pas pour les consommateurs mais pour les autoroutiers. Il faut tout de même rappeler le grand bénéfice de ces contrats. En effet, contrairement aux routes départementales et nationales parfois constellées de nids-de-poule, nous avons un réseau autoroutier parfaitement entretenu et très peu accidentogène. Cela ressemble donc un peu à des autoroutes de luxe dont les prix vont avec.
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Vinci autoroutes, le principal exploitant, a tout de même annoncé le 11 juillet qu’il ferait un geste. Mais, là encore le geste est assez malin. On se souvient de la ristourne de TotalEnergies sur le carburant uniquement dans ses stations d’autoroute, qui ne représente que 20% de son réseau. On pense aussi au geste, dans la foulée, de CMA-CGM, le géant français de la marine marchande, qui a réduit le prix de ses conteneurs à destination de la France, mais sans réel impact sur le prix des produits pour les consommateurs. Ces deux géants ont alors sans doute échappé à une lourde taxe sur leurs profits exceptionnels du moment. Hier, Vinci autoroutes a donc annoncé une réduction de 10% sur les tarifs des péages. Jusque-là le geste semble salutaire pour les automobilistes qui empruntent la route des vacances mais attention la suite est moins agréable. En effet, cette réduction de 10% est effective uniquement si vous payez en chèques vacances. De plus, Il faut préalablement avoir déposé vos chèques vacances sur le badge de télépéage, ce qui peut prendre jusqu’à un mois. Pas besoin de rappeler qu’on est déjà le 12 juillet. D’ailleurs, dans Les Echos du 12 juin, un acteur du secteur souligne que les touristes étrangers vont passer sur nos autoroutes cet été et donc payer les péages. Un lot de consolation quand on sait que 40% du prix de ces mêmes péages retourne dans la poche de l’Etat.
François Geffrier
Ecoutez François Geffrier (à partir de 7’00) :