La rentrée littéraire c’est une grande tradition qui fait de moins en moins recette du coup les éditeurs s’adaptent. Cette année, on attend à peine un peu plus de 500 nouveautés entre la mi-août et la fin octobre. C’est plus de 7% de moins que l’an dernier et ça devrait même être la rentrée littéraire avec le moins de nouveautés depuis 20 ans. On est loin des plus de 700 ouvrages au pic. On revient aux niveaux du siècle dernier.
Pourquoi une telle chute ?
C’est Jérôme Lindon, qui dirigea les Editions de Minuit, qui l’expliquait parfaitement quand il disait : « L’édition est la seule industrie dans laquelle, à une baisse constante de la demande, correspond une augmentation constante de l’offre». Pendant longtemps, pour tenter de compenser le déclin du marché, les éditeurs ont joué la carte de la production. Ou même de la surproduction. Quand vous lancez des centaines de livres en même temps, vous aurez peut-être un best-seller. Mais ça n’est même pas sûr. Ce qui est certain par contre c’est que quand vous lancez trop de livres en même temps, les libraires n’ont pas le temps d’ouvrir les cartons, de lire les nouveautés et de mettre en avant leurs coups de cœur. Ils sont noyés. Et c’est pareil pour les journalistes ou les éditeurs. Ils ne peuvent pas parler de tout. Il y a finalement trop de brouhaha. Le volume est devenu contre-productif. D’ailleurs les nouveautés qui génèraient 63% du chiffre d’affaires de l’édition en 2014 n’ont représenté que 58% des ventes en 2018. Quand les lecteurs s’y perdent, ils relisent plus de classiques en poche. Ils vont vers les valeurs sûres.
La rentrée littéraire c’est une grande tradition qui fait de moins en moins recette du coup les éditeurs s’adaptent. Cette année, on attend à peine un peu plus de 500 nouveautés entre la mi-août et la fin octobre. @DavidBarroux #ClassiqueMatin https://t.co/eAUyuqaAKx pic.twitter.com/zYXuJOu5yX
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Est-ce que l’édition va du coup changer de stratégie ?
Inonder le marché c’est devenu une sorte de drogue. Cela occupe les équipes. Cela génère des avances de trésorerie. Cela permet de se positionner pour les prix littéraires qui sont remis à l’automne et qui stimulent les ventes de Noël. Si on réduit trop brutalement les volumes, cela risque de provoquer un contre-choc. En fait, l’édition est plutôt entrée dans une phase de descente en pente douce. L’an dernier, le nombre de nouveautés avait reculé déjà de 2-3%. Ce que les éditeurs constatent c’est un peu comme dans le cinéma une forme de « best-sellerisation ». Mieux vaut promouvoir un peu moins de livres mais à fond pour essayer de doper les ventes. Les best-sellers, c’est-à-dire les livres vendus à plus de 50.000 exemplaires pèsent presque 20% du chiffre d’affaires de la littérature. C’est 5 points de plus en 10 ans. Comme souvent en économie, pour gagner, il ne faut pas chercher systématiquement à faire plus. Il vaut mieux faire… mieux.
David Barroux