Guerre en Ukraine : Quelles sont les alternatives pour se passer du gaz russe ?

istock

La patronne d’Engie, Catherine MacGregor, s’exprimait ce 7 mars dans Les Echos. Son message est clair : l’Europe aura beaucoup de mal à se passer du gaz russe.

En moyenne, 40% du gaz en France est russe

Catherine MacGregor, qui dirige notre ancien Gaz De France, ne manie pas la langue de bois. Elle ne dit pas qu’il est impossible de se passer du gaz russe mais elle affirme que si l’on devait s’en passer, « nous entrerions dans un scénario de l’extrême ». En clair, il faudrait consommer moins d’énergie et donc moins se chauffer ou faire tourner moins vite les usines. Il faudrait également accepter de payer notre énergie plus chère. La facture augmenterait pour les ménages mais aussi pour l’Etat car le choc inflationniste serait tel que la puissance publique devrait assumer une partie de la hausse. Se passer du gaz russe veut donc dire se résigner à vivre moins bien, pour plus cher.

A lire aussi

 

Mais pourquoi sommes-nous si dépendants du gaz russe ? L’énergie est une équation. Aujourd’hui la donne est simple, le gaz représente entre 20 et 40% de notre mix énergétique en Europe. Et le gaz russe représente entre les pays, entre 20 et 100% du gaz que nous consommons. En moyenne, 40% de notre gaz est russe. Si on coupe le robinet, on se prive donc d’une source d’énergie qui représente moins d’une dizaine de pourcents de notre mix énergétique total en France, mais deux ou trois fois plus dans d’autres pays. A court terme, il n’y a pas de risque. On a des réserves pour passer l’hiver qui se termine et qui pour l’instant, est relativement doux. Mais normalement on profite de l’été pour reconstituer nos stocks. Aujourd’hui ils sont déjà très bas car comme les prix étaient élevés, les géants du gaz n’ont pas acheté plus pour reconstituer leurs stocks. Ils espéraient une baisse des prix cet été mais elle ne va pas intervenir. Le gaz va coûter plus cher et si l’on arrête d’acheter aux Russes, on attaquera l’hiver prochain sans réserves.

Le prix du gaz, qui a déjà bondi de 50% en un an, va continuer à augmenter

L’énergie est un métier des cycles longs. On ne peut pas changer l’équation énergétique en un claquement de doigts. La meilleure solution serait de consommer moins d’énergie. Mais cela prend des années à rénover des habitations et changer de fournisseur de gaz est compliqué. Les délais pour construire des gazoducs sont également très longs. On pourrait acheter plus de GNL, le gaz liquéfié, mais il faut trouver des fournisseurs et il faut construire des usines pour le réceptionner. Cela aussi prend des années, tout comme construire plus d’éolien, de solaire ou de nucléaire. L’énergie est une course de fond et là, on nous demande de courir un sprint. Cela s’annonce par conséquent très compliqué.

A lire aussi

 

En fait le bon cocktail serait un mélange. Si l’on veut priver la Russie des recettes du gaz, il faut déjà que l’on accepte le signal prix. Le prix du gaz, qui a bondi de 50% en un an, va continuer de monter et on doit en consommer moins. Il faut sans doute que le gouvernement nous pousse à moins nous chauffer. Il faudrait peut-être également alléger les procédures pour déployer de l’éolien et repousser les fermetures de centrales nucléaires en Allemagne. Acheter un peu plus de gaz à l’Algérie ou au Qatar est une alternative comme produire davantage de biogaz, tiré des déchets agricoles. Mais il faut surtout savoir qu’il n’y a pas de solution miracle.

David Barroux

Retrouvez le Décryptage Economique