La nomination d’Émilie Delorme à la tête du Conservatoire a fait débat

Officiellement Émilie Delorme prendra la tête du conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris le 1er janvier 2020. D’après une enquête du magazine Le Point, cette nomination a créé des remous dans le monde de la musique.

Émilie Delorme : L’obsession de la décolonisation

Émilie Delorme devient donc la 1ère femme nommée directrice de la prestigieuse institution depuis sa création en 1795. Sur le papier le nom de l’actuelle directrice de l’Académie du Festival d’Aix-en-Provence semblait une évidence, d’autant qu’une telle décision vient interrompre une longue série critiquée de nominations masculines (aux opéras de Paris et Lyon et au futur Conseil National de la Musique). Une nomination qui a fait débat dans le milieu musical dans lequel ses opposants stigmatisent ses positions idéologiques très marquées, notamment en matière de parité et de défense de la diversité. Le Point, cite par exemple un enseignant qui estime que : « Le Conservatoire national de Paris échappait jusqu’ici à la novlangue des sciences de l’éducation, aux quotas paritaires, ou encore aux obsessions de représentation de la diversité sur fond de repentance coloniale… Car nous pensions qu’il suffisait de se concentrer sur l’excellence et le mérite ! ». Le magazine insiste sur « ses sympathies pour une idéologie décoloniale très ancrée à gauche ». Positions assumées par Émilie Delorme qui n’a pas hésité à partager, sur son compte Facebook  plusieurs publications du collectif « Décoloniser les arts », une association qui estime, selon ses propres termes que : « D’un point de vue symbolique, les arts sont colonisés tout simplement parce qu’ils se sont forgés à travers une histoire coloniale et postcoloniale, qu’ils véhiculent parfois un imaginaire et des représentations teintées d’exotisme ou de stéréotypes raciaux ». Une position également évoquée par Émilie Delorme dans un tweet où elle interpellait Jean-Michel Blanquer sur ce sujet en novembre 2017.

Une vision anti-universaliste et un engagement en faveur du féminisme intersectionnel

Toujours selon Le Point, le milieu musical s’interroge sur « la compatibilité entre la vision clairement anti-universaliste des thèses défendues par Émilie Delorme et la charge qu’incombe la direction d’une institution élitiste, organisée autour d’un fonctionnement méritocratique ». Le magazine cite l’exemple du Conservatoire national supérieur d’art dramatique (CNSAD) où la directrice nommée en 2013, Claire Lasne a instauré un concours « pour les non-binaires ». Les positions radicales d’Émilie Delorme en matière de parité, favorables au féminisme intersectionnel (prise en compte des problèmes des femmes subissant d’autres discriminations en plus du sexisme), sont également pointées du doigt. Le magazine cite une musicienne, qui l’a côtoyée à plusieurs reprises lors d’événements organisés par l’Académie du festival d’Aix, qui évoque « l’organisation d’ateliers non mixtes, les women creation workshops, réservés aux femmes se déroulent en parallèle d’ateliers similaires, à la différence qu’ils sont mixtes…»

Philippe Gault

 

« DROIT DE REPONSE DE MME EMILIE DELORME – Le 15 décembre 2019, postérieurement à ma nomination à la direction du Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, le site www.radioclassique.fr a publié un article, sous la plume de Monsieur Philippe Gault intitulé « La nomination d’Émilie Delorme à la tête du Conservatoire a fait débat ».

 A travers des témoignages anonymes qui ne reflètent en rien mes opinions, et sans faire état ni de mon parcours, ni du projet que j’entendais mener pour l’institution, le journaliste croyait pouvoir m’imputer, sans avoir pris la peine de me contacter afin de rétablir le contradictoire dans un article exclusivement à charge, une « idéologie décoloniale ».

 Sous un sous-titre évocateur (« Émilie Delorme : L’obsession de la décolonisation »), le journaliste n’hésite pas à remettre en cause la sincérité et l’intégrité de mon engagement professionnel, en faisant état de mes prétendues « sympathies pour une idéologie décoloniale très ancrée à gauche » et en m’attribuant des thèses dont la vision serait « clairement anti-universaliste », et qui seraient, selon le journaliste, « incompatibles avec la charge qu’incombe la direction d’une institution élitiste ».

 Ces accusations sont parfaitement infondées dès lors qu’elles ont pour effet de me présenter à tort comme « anti-universaliste » et proche d’une idéologie « décoloniale » avec laquelle je n’ai aucun lien. 

Comme le souligne la réaction forte et soudée notamment du secteur musical, lutter pour la liberté de création et la liberté de penser est plus que jamais nécessaire. C’est mon intention et les tentatives de nuisance portées à l’encontre de ma personne ne parviendront pas à m’en dissuader et ne m’empêcheront pas de réfléchir encore et toujours à l’avenir que nous souhaitons offrir aux artistes de demain et à la société dans laquelle nous souhaitons vivre.

 Je reste déterminée aujourd’hui, en ma qualité de Directrice du Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, à mener à bien un projet fondé sur l’ambition, l’ouverture, et le rayonnement international, à la hauteur de ce que requiert un tel établissement ».

 

 

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