Justice : Un salarié licencié pour avoir déménagé trop loin de son entreprise

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Un salarié des Yvelines a été licencié par son entreprise pour avoir déménagé dans le Morbihan. Dans une période où le télétravail se systématise, des centaines de milliers de Français qui ont changé de domicile pourraient être concernés.

Le salarié a refusé de revenir en région parisienne et s’est fait licencier

Le 22 avril, le journal Le Parisien revient sur une décision de justice très marquante. Une affaire qui date de 2018, bien avant la pandémie. On pensait jusqu’à présent qu’un employeur n’avait pas à se mêler du lieu de domicile de ses salariés. Pourtant, dans ce cas précis, un collaborateur a quitté son logement des Yvelines pour partir s’installer en Bretagne sans demander l’autorisation à son entreprise. Cet homme qui travaillait à Carrières-sur-Seine a déménagé dans le Morbihan, à 440 km de son entreprise. Désormais pour se rendre sur son lieu de travail, il devait effectuer des trajets de 4h30 en voiture ou 3h30 en train.

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Heureusement cela n’arrivait pas tous les jours mais uniquement quand il avait besoin d’être physiquement présent. L’employé devait être en présentiel moins d’un jour par semaine. Le reste du temps, il était en déplacement en région ou à l’étranger. Malgré cette distance, l’employé n’arrivait jamais en retard. Le patron a donc découvert ce déménagement des mois plus tard. Son employeur lui a alors demandé de revenir en région parisienne. Le salarié a refusé et s’est fait licencier en juin 2019. Les prud’hommes ont donné raison à l’entreprise tout comme la Cour d’appel de Versailles. Cette récente décision de justice étonne les spécialistes du droit du travail, comme l’avocate Myriam Adjerad, interrogée par Le Parisien. Elle relève la stratégie assez fine choisie par l’employeur, devant les tribunaux : « le patron n’a pas axé sa défense sur l’intérêt de l’entreprise mais sur l’obligation d’assurer la sécurité et la santé du collaborateur ». Effectivement, l’article L.4121-1 du Code du travail précise que l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs.

Cette décision peut-elle faire jurisprudence ?

En 2022, ce phénomène concerne des dizaines de milliers, peut-être des centaines de milliers de salariés. Depuis le premier confinement du printemps 2020, nombreux sont ceux qui ont déménagé sans rien dire à leur entreprise. La jurisprudence serait donc très intéressante car normalement, sauf mention dans le contrat de travail, tout travailleur a la possibilité de vivre où il le souhaite. Pour le savoir, il faudra attendre un éventuel pourvoi en Cassation de la part de ce salarié. Les employeurs regarderont cela avec la plus grande attention.

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Le télétravail n’a ni été évoqué dans le débat d’entre-deux-tours ni dans la totalité de la campagne. Or, s’il y a bien une transformation majeure dans la vie de millions de Français et de milliers d’entreprises, c’est bien cette révolution du télétravail. D’ailleurs ce changement est souvent positif car il est porteur de plus de temps libre, de flexibilité dans son organisation personnelle et d’économies pour les sociétés. Cela ne coûtait donc pas grand-chose d’évoquer ce sujet, plutôt que de pinailler sur des virgules de TVA ou une prétendue affaire McKinsey.

François Geffrier 

Ecoutez François Geffrier (à partir de 6′) :

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