Ségolène Royal appelant à voter Jean-Luc Mélenchon, on ne s’attendait pas vraiment à ça à gauche. Qu’est-ce qui explique cette prise de position ?
Jean-Luc Mélenchon, le candidat le plus solide et qui a le plus d’expérience à gauche ?
On ne s’y attendait pas, car le moins que l’on puisse dire c’est que la gauche révolutionnaire de Mélenchon ne ressemble pas à la gauche tempérée de Ségolène Royal, une Ségolène Royal qui, rappelons-le, avait cherché l’alliance avec Bayrou en 2007 et n’aurait pas détesté qu’Emmanuel Macron la rappelle au gouvernement en 2017. Mais il faut bien comprendre que la prise de position de l’ancienne finaliste à la présidentielle n’est pas d’ordre idéologique mais de nature électorale. Elle part d’une évidence que chacun constate : la gauche est divisée, que la primaire populaire n’a pas fait émerger une candidature commune et que personne ne veut se retirer au profit d’un autre. Ce que les états-majors et les candidats ne peuvent ou ne veulent pas faire, elle propose aux électeurs de le faire eux-mêmes : voter « utile ».
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Ce qui veut dire voter pour celui qui est le mieux placé à gauche dans les sondages, qui est le plus solide et a le plus d’expérience, à savoir : Jean-Luc Mélenchon. Et en conséquence, elle conseille à Anne Hidalgo, la candidate de son parti, le PS, de s’arrêter. Mais elle ne sera pas écoutée par la maire de Paris, et elle le sait. Et au passage, Ségolène Royal règle ses comptes avec un parti qui a tout dernièrement encore refusé de l’investir aux sénatoriales. Depuis le début, elle critique la démarche de la maire de Paris, et elle n’est pas mécontente de rappeler qu’elle avait alerté sur le risque de fiasco de cette candidature.
Mélenchon est entre 10 et 11,5% d’intentions de vote dans les sondages
Mais Anne Hidalgo ne va pas se retirer, ni Yannick Jadot, ni le communiste Fabien Roussel, trop heureux du frémissement médiatique dont il bénéficie en ce moment. Il y en a peut-être une qui ne sera pas sur la ligne de départ, c’est Christiane Taubira. Mais si elle renonce ce ne sera pas parce qu’elle l’aura décidé mais parce qu’elle n’aura pas réussi à obtenir ses parrainages. Jean-Luc Mélenchon peut-il profiter d’un vote utile à gauche ? Il est clivant et cassant, même si Royal prétend qu’il a arrondi les angles. Donc on le voit mal rassembler toute la gauche ou toutes les gauches.
Mais c’est vrai qu’il est loin devant tous les autres.
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Il est à 10, 11, 11,5%. Et pour l’instant, avec Marine Le Pen, Éric Zemmour et Valérie Pécresse, la qualification au second tour se joue autour de 15 %. Mélenchon reste derrière, mais pas tant que ça. Et le vote utile, ça peut être ça : une gauche qui se voit aujourd’hui totalement dans les choux, mais qui, si Mélenchon atteignait les 15% pourrait lui aussi participer à la bataille pour une place au second tour. Après tout, il y a cinq ans, à la même date, il était aussi autour de 11% ; il a fini à 19%. Certains à gauche peuvent se dire que ça peut valoir le coup de concentrer les votes sur lui. C’est la voie que propose Royal.
Guillaume Tabard