Samia Maktouf est l’avocate d’une quarantaine de victimes des attentats du 13 novembre 2015. A quelques heures de l’ouverture de ce procès historique, elle était l’invitée de Renaud Blanc dans la matinale de Radio Classique. Elle a insisté sur l’importance qu’il puisse se tenir « après 6 longues années d’attente ».
« Ces terroristes vont se réjouir de pouvoir s’exprimer, confirmer leurs allégeances à Daesh »
Représentant plusieurs dizaines de parties civiles au procès des attentats de Paris et Saint-Denis, l’avocate Samia Maktouf a tenu à préciser que les victimes « ne constituent pas une masse compacte. Elles ont chacune un nom, une vie, un parcours brisé, un avenir, une histoire. Il y a autant d’histoires que de victimes ». Et chacune réagit différemment à la tenue de ce procès historique. Certains sont angoissés, explique l’avocate, d’autres ont finalement décidé de ne pas venir alors qu’ils s’étaient organisés, d’autres encore ont été hospitalisés.
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Dans le box, 14 des 20 accusés seront présents physiquement, dont Salah Abdeslam, unique membre encore en vie du commando terroriste. « Son silence ne fera pas obstacle à la vérité, à la justice que les victimes attendent », a lancé l’avocate. Mais le silence ne sera sans doute pas le seul moment éprouvant pour les parties civiles, a-t-elle prévenu : « ces terroristes vont se réjouir de pouvoir s’exprimer, confirmer leurs allégeances à Daesh, lire peut-être quelques sourates de Coran. »
François Hollande témoignera au procès le 10 novembre
Elle pointe également « la colère des victimes », face à certaines failles du renseignement : « Les terroristes étaient connus et fichés ». Alors est-ce le procès des accusés ou celui des échecs du renseignement, a réagi Renaud Blanc. « C’est un piège à éviter », a répondu Samia Maktouf, insistant sur le fait que la cour d’assises n’est pas le lieu pour juger les institutions, les politiques ou le renseignement. S’adressant justement aux politiques, dont certains se succèderont à la barre en tant qu’experts, l’avocate a souhaité « lancer un appel » en cette année présidentielle : « N’utilisez pas l’enceinte judiciaire pour en faire une tribune politique ! La parole est aux victimes, pas aux politiques ! ». Lors de ce procès, l’ancien président François Hollande sera invité à s’exprimer, tout comme l’ex Premier ministre Manuel Valls, Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur au moment de l’attentat et Jean-Yves Le Drian, ancien ministre des Affaires Etrangères.
Béatrice Mouedine