La question institutionnelle a été quasiment totalement absente de la campagne, mais cette semaine Emmanuel Macron et Marine Le Pen en ont parlé en se prononçant pour le septennat. Cette question peut-elle être un enjeu de cette présidentielle ?
Macron accuse Le Pen d’être fascinée par le modèle illibéral du Premier ministre hongrois Orban
Personne n’imagine qu’une réforme des institutions passionne et mobilise les électeurs au même titre que le pouvoir d’achat, la sécurité ou les retraites. Pourtant comment nier qu’il y ait une crise de confiance dans les structures politiques, une insatisfaction envers les processus de décision. Souvenez-vous par exemple des revendications exprimées durant la crise des Gilets jaunes. Il n’aurait pas été aberrant qu’une campagne présidentielle soit le moment d’un grand débat sur le fonctionnement de la démocratie. D’ailleurs en 2017, Emmanuel Macron avait présenté un important paquet institutionnel avec entre autres la réduction du nombre de parlementaires. Cette fois, rien de pensé ou de structuré sur le sujet. Et du coup, au gré des déplacements ou des interviews le chef de l’Etat lance quelques idées sans qu’on sache si ce sont des vraies propositions ou de simples réflexions.
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Il est quand même question de référendums pour Marine Le Pen, de conventions citoyennes pour Macron. On parle de proportionnelle. Tout cela va-t-il aboutir ? C’est vrai que la question d’une meilleure participation aux décisions est un sujet porté par les deux candidats, lesquels s’accusent d’ailleurs l’un l’autre de mépriser les libertés et la démocratie. Macron accuse Le Pen d’être fascinée par le modèle illibéral d’Orban. Le Pen accuse Macron d’avoir rogné les libertés publiques face aux Gilets jaunes ou plus encore durant la crise du Covid. Mais en la matière on est dans la posture.
Une vision plus arbitrale qu’exécutive de la fonction présidentielle
Le référendum d’initiative citoyenne, ça sonne bien mais comment éviter la dictature de revendications catégorielles. Et dire, comme Marine Le Pen, « on fera un référendum sur l’immigration », c’est bien flou et ça ressemble plus à un slogan car un projet opérationnel. Promettre des conventions citoyennes, comme le fait Emmanuel Macron, pourquoi pas, mais il faut quand même tirer les leçons du fiasco de celle sur le climat. Et en envisager une sur la fin de vie, autrement dit, l’euthanasie, n’est-ce pas un moyen déguisé d’imposer une revendication poussée à coups de sondages ? Partout, y a du flou.
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Et le retour du septennat, c’est sérieux ? Pour Marine Le Pen, c’est une proposition inscrite dans son projet. Pour Emmanuel Macron, il trouve juste que c’est une bonne option, mais il n’a pas dit qu’il le ferait. En revanche, il a évoqué l’idée de décaler dans le temps les législatives et la présidentielle pour qu’elles ne soient plus une simple confirmation de la présidentielle comme c’est le cas depuis 2002. Septennat ou décalage des scrutins, l’idée implicite c’est le retour à une vision plus arbitrale qu’exécutive de la fonction présidentielle. Est-ce possible, est-ce souhaitable ? C’est en tout cas une question de fond qui aurait mérité d’être creusée au moment où l’on va justement choisir un président.
Guillaume Tabard