Présidentielle : Emmanuel Macron vire à gauche, quels sont les risques pour lui ?

Eliot Blondet/POOL/SIPA

Emmanuel Macron s’est rendu le 11 avril dans le Nord et dans le Pas-de-Calais, terres de Marine Le Pen. Ces déplacements dans le camp de son ennemie nous donnent quelques indications sur le ton et la ligne de sa campagne de second tour.

Emmanuel Macron craint que les électeurs de gauche votent Marine Le Pen

En se rendant dans le Nord et dans le Pas-de-Calais, Emmanuel Macron à montrer que sa campagne d’entre-deux-tours s’annonce musclée. Il lui a été assez reproché de s’être déclaré trop tardivement, d’avoir refusé le débat et de s’être contenté du strict minimum en matière d’exercices militants. Résultat, il n’a pas pu éviter une poussée des deux extrêmes. Désormais le président sortant a compris qu’il fallait enfiler le bleu de chauffe. Ces déplacements dans les fiefs du Rassemblement National sont une manière de montrer qu’il n’a pas peur d’aller au contact. Cela lui permet également d’aller à la rencontre de l’électorat populaire. En effet, ces électeurs lui font défaut et soutiennent vigoureusement sa rivale. Sur le plan politique c’est donc à la gauche qu’il s’adresse. Il veut parler à la gauche de Jean-Luc Mélenchon et à ses 8 millions d’électeurs. Il veut dialoguer avec les nombreux jeunes qui l’ont souvent détesté, caricaturé, combattu et parfois haï, mais dont il a besoin aujourd’hui pour être certain de battre Marine Le Pen.

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Il faut comprendre que la campagne de Macron s’annonce prioritairement à gauche car les réserves de voix sont bien là. De plus Macron a en grande partie siphonné dès le premier tour l’électorat de la droite libérale, comme le prouve le score de Valérie Pécresse. Il n’a donc plus grand-chose à gagner de ce côté donc il se tourne stratégiquement vers l’autre. Or en 5 ans, le fossé n’a cessé de se creuser entre Macron et la gauche. Le chef de l’Etat craint que la détestation dont il fait l’objet ne conduise une grande partie de cet électorat à l’abstention ou, encore pire, à voter Marine Le Pen. Il devrait alors prochainement aller sur le terrain de la jeunesse et celui de l’écologie. Le 11 avril, il a d’ailleurs fait ce qu’on appelle un bougé sur les retraites.

La réforme des retraites dans la balance afin de convaincre l’électorat de Jean-Luc Mélenchon

Cela ne veut pas dire qu’il renonce à cette réforme mais il compte l’atténuer et ouvrir le débat. Il sait très bien que pour les réformes nécessaires mais impopulaires, la promesse de concertation est souvent un premier pas dans le sens de la marche arrière. Cela est d’ailleurs un peu surprenant, pour ne pas dire inquiétant. Dans son programme pour un deuxième mandat, il n’y a pas 50 mesures qui ont été retenues. Seule, la retraite à 65 ans est synonyme du courage réformateur qui a séduit à droite. A l’inverse c’est une mesure rédhibitoire pour la gauche mélenchoniste. La campagne du second tour vient à peine de commencer, et déjà il revendique ne pas être bloqué sur l’âge limite de 65 ans. Il annonce qu’il faudra en discuter, prendre du temps et organiser pourquoi pas un référendum, dont on devine très bien la réponse sur un tel sujet. Commencer comme cela, et si rapidement, ne donne pas l’impression d’une grande détermination pour mener à bien cette réforme. Cela paraît donc être cher payé pour des voix mélenchonistes que l’on n’imagine pas se laisser convaincre aussi facilement.

Guillaume Tabard

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