Emmanuel Macron accueille ce jeudi 10 mars à Versailles les dirigeants des 27 pays de l’Union européenne. Se montrer président de la France et président de l’Europe face à la Russie, c’est encore le meilleur moyen de faire campagne. Ça n’entre pas dans les comptes du candidat, mais ça a un impact sur l’opinion bien plus puissant que tous les meetings.
Guillaume Tabard : « L’intervention russe en Ukraine a réveillé l’Europe »
Le chef de l’Etat va pouvoir jouer les metteurs en scène d’une Europe à la fois ferme, unie et capable de prendre des décisions ; ce qu’elle n’a été que très rarement. Emmanuel Macron a souvent parlé d’une Europe-puissance. Cela avait fait l’objet d’un des premiers grands discours de son quinquennat : le discours de La Sorbonne, en septembre 2017. Mais pour être honnête cette formule est longtemps restée une formule creuse et un vœu pieux. De l’Europe de ces dernières années, on avait surtout retenu l’interminable gestion du Brexit, et Macron lui-même semblait suffisamment accaparé par les tracas nationaux intérieurs. L’Union européenne restait un « machin » lointain et qui ne brillait pas par sa capacité à faire avancer le cours des choses.
Brutalement, l’intervention russe en Ukraine a réveillé l’Europe. C’est cette Europe réveillée qui tient aujourd’hui et demain son sommet de Versailles.
A lire aussi
Ce qu’Emmanuel Macron peut dire, c’est que cette Europe-puissance qui se révèle, correspond à celle dont il a toujours rêvé et qu’il avait théorisée, dans ce discours de La Sorbonne. Mais si le volontarisme macronien était nécessaire, il n’était pas suffisant. Et ce qu’on vérifie depuis près de deux ans, c’est que ce sont les crises qui font bouger l’Europe ; qui l’obligent à bouger. Il y avait eu la crise du Covid. Les commandes de masques et de vaccins groupées. Et surtout le plan de relance reposant sur un emprunt commun de 750 milliards d’euros. Accepter une dette commune, y compris de la part de la rigoureuse Allemagne, ce fut un tournant capital et historique. Et puis maintenant la décision de livrer des armes à l’Ukraine et de prendre des sanctions communes contre la Russie, c’est un autre tournant historique que personne n’imaginait même les plus euro-optimistes.
Emmanuel Macron pourra dire que son Europe-puissance n’était pas que de l’incantation
On peut dire que sans ces circonstances exceptionnelles, rien de cela ne serait arrivé. Mais à l’arrivée, ça permet à Emmanuel Macron de dire que son Europe-puissance n’était pas que de l’incantation. Il aura beau jeu de prétendre que l’Histoire a validé ses intuitions. Cela annonce un projet de campagne centré sur l’Europe, plus que jamais, même si les premières mesures qu’il met sur la table – la suppression de la redevance télé, la retraite à 65 ans, la réforme du lycée professionnel – sont très nationales. Mais lundi à son QG il a énuméré quatre piliers pour son projet, quatre pactes. Et le premier d’entre eux c’est le pacte européen. Mais pour que ce soit véritablement un atout dans sa campagne, il faut qu’il obtienne demain, à l’issue de ce sommet de Versailles, des avancées à la fois concrètes et spectaculaires.
Guillaume Tabard