Marine Le Pen lâchée par Marion Maréchal : derrière le conflit familial, de vraies différences politiques

Gage Skidmore / Wikimedia Commons

Sans qu’elle ait encore rallié Eric Zemmour, Marion Maréchal a semé le trouble au RN en annonçant qu’elle ne soutiendrait pas sa tante. Est-ce le retour de Dallas chez les Le Pen ?

L’union des droites est le grand projet d’Eric Zemmour

La dimension familiale est évidemment une composante importante de cette décision de Marion Maréchal de ne pas apporter son soutien à Marine Le Pen. Je ne crois pas cependant qu’il faille la survaloriser. C’est un détail, mais qui a son importance : cela fait quatre ans maintenant qu’elle se fait appeler Marion Maréchal et qu’elle a donc laissé tomber le patronyme Le Pen en signe d’émancipation d’une histoire strictement familiale. Le vrai sujet est politique. Et là encore, il n’est pas nouveau. Depuis qu’elle est entrée en politique, il y a dix ans maintenant, l’ex-benjamine de l’Assemblée défend une ligne que l’on pourrait qualifier de libérale-conservatrice tandis que Marine Le Pen a incarné une ligne nationale-souverainiste.

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Sur le plan politique, Marion Maréchal croit à l’union des droites alors que Marine Le Pen n’y a jamais cru et n’y croit toujours pas, recherchant plutôt à fédérer un arc populaire. Or l’union des droites, c’est le grand projet d’Éric Zemmour. Il y a donc une certaine logique à ce que l’ex députée du Vaucluse tombe de ce côté. Je dirais même que c’était prévisible. Même si cette logique possible passe par une transgression familiale qui a un air de déjà vu chez les Le Pen.

Marine Le Pen a confessé être affectée personnellement

Marine Le Pen s’est dite affectée par ce départ. Cette décision de sa nièce peut-elle l’affecter aussi sur le plan électoral ? Par définition, une défection ne fait jamais de bien alors qu’un ralliement ne fait jamais de mal. Mais il est évident que la bascule de Marion Maréchal pèse plus politiquement, affectivement et électoralement que celle l’eurodéputé Jérôme Rivière par exemple. Elle est un phénomène rare en politique. Il lui a fallu très peu de temps, malgré sa jeunesse, pour acquérir une notoriété, pour se faire un nom et c’est encore plus rare, un prénom. Elle a du talent et du charisme. Dans le match Zemmour-Le Pen, la carte Marion est une carte maîtresse. Il est intéressant de voir comment a réagi la candidate RN. Elle aurait pu la prendre de haut, minorer l’impact de son choix comme elle l’a souvent fait par le passé avec d’autres départs. Non, cette fois, elle s’est dite et s’est montrée ébranlée.

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Marine Le Pen a confessé être affectée personnellement. Il y a de la sincérité bien sûr. C’est vrai que l’hostilité rencontrée parce qu’elles avaient le tort de s’appeler Le Pen crée un lien particulier. Mais Marine Le Pen fait aussi de la politique. Afficher sa blessure face à ce qui peut être regardé comme une trahison, cela humanise et suscite une forme de compassion. Cela rappelle le Jacques Chirac de 1995, lâché par les siens au profit d’Edouard Balladur. A l’arrivée, cela lui avait rendu service. Il y a aussi cette stratégie d’image que joue la candidate du RN.

Guillaume Tabard

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