La crise en Guadeloupe est-elle une menace pour l’exécutif ?

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Jean Castex a fait quelques annonces hier soir pour répondre à la montée de la violence en Guadeloupe, notamment la création d’une instance de dialogue pour convaincre les professionnels de se faire vacciner contre le Covid-19. Mais Emmanuel Macron l’a dit lui-même : la situation est explosive.

La hantise de l’exécutif, subir une version actualisée des « gilets jaunes »

Pourquoi la situation en Guadeloupe est-elle explosive ? Parce qu’il y a un cocktail détonnant de facteurs différents. Une grogne sanitaire de la part de ceux qui refusent l’obligation vaccinale, une colère sociale liées aux faiblesses endémiques d’une Guadeloupe où le taux de chômage est le double de celui de la métropole et où un tiers de la population est en dessous du taux de pauvreté, et enfin une flambée de violence urbaine avec son lot de dégradations et de pillage. Et, inquiétude supplémentaire, le feu est en train de gagner la Martinique voisine.

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La hantise de l’exécutif, c’est bien de subir une version actualisée des « gilets jaunes » et de revivre ce qu’il s’était passée en 2009 quand les deux îles avaient subi des grèves durant plus de quarante jours. A voir certaines images, à entendre certaines déclarations sur place, on pourrait croire qu’il y a un risque de révolte sociale généralisée, mais attention aux effets d’optique. La contestation vaccinale, c’est une poignée d’irréductibles qui ont souvent un agenda politique en tête. Et les violences, c’est une autre poignée d’enragés, de casseurs et de pilleurs. Et ce serait une illusion, et même un mensonge de dire que c’est la Guadeloupe tout entière qui bascule dans la révolte. L’immense majorité des Guadeloupéens ne soutiennent pas cette amorce de révolte. Ils dénoncent au contraire cette violence bête et aveugle et leur souhait est que l’ordre soit rétabli au plus vite. Voilà pourquoi Jean Castex, dans son intervention hier soir à Matignon a clairement distingué la question sécuritaire et la question sociale. Et il a fait du retour à l’ordre un préalable à la discussion sur d’autres volets.

 

Après la grande grève de 2009, 600 millions d’euros et une kyrielle d’emplois publics avaient été déversés sur la Guadeloupe

Ce qui est en jeu, c’est bien sûr la situation en Guadeloupe, mais c’est aussi l’image d’autorité de l’exécutif auprès de l’opinion en métropole. Macron, Castex, tous les messages hier allaient dans le sens de la fermeté et de l’application sans concession de la loi ou des règles sanitaires. Au-delà du problème de la violence, n’y a-t-il pas aussi à apporter des réponses à des problèmes plus profonds, notamment sociaux, en Guadeloupe ? Qu’il y ait des retards importants et insupportables, c’est une évidence. On peut penser par exemple aux problèmes d’accès à l’eau potable. Mais le risque de ce type de pression c’est de pousser à des réponses à la fois immédiates, simplistes et au fond inefficace. Après la grande grève de 2009, 600 millions d’euros et une kyrielle d’emplois publics avaient été déversés sur la Guadeloupe. Pour des résultats qui, le moins qu’on puisse dire n’ont pas été proportionnels aux moyens engagés. La nécessité, réelle, de relancer l’économie, le tourisme, le développement de l’île ne passe pas par le chantage de jusqu’auboutistes qui défient la République plus qu’ils n’aident leur territoire.

Guillaume Tabard

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