La majorité présidentielle a décidé de présenter une proposition de loi afin d’inscrire le « droit à l’avortement » dans la Constitution. Cette décision fait suite au recul de la Cour suprême aux Etats-Unis sur la question, et permet à l’exécutif de se lancer dans une quête de coalition majoritaire. Pourtant au sein même de la majorité, certains, comme François Bayrou, semblent hostiles à cette proposition.
Marine Le Pen s’est contentée d’un étrange « pourquoi pas ? »
Après la décision de la Cour suprême américaine, la majorité présentera une proposition de loi pour inscrire le « droit à l’avortement » dans la Constitution. On se demande alors si un consensus est possible sur cette question. Une chose est sûre, l’opinion française considère dans son écrasante majorité que l’avortement est un « droit ». Les mouvements «pro-vie », qui prône que l’enfant qui va naître a prioritairement le droit de vivre, sont très faibles comparés à ce qu’ils sont aux Etats-Unis. Les politiques qui réclament cette inscription vont donc s’appuyer sur cela. Ensuite il y a un consensus parmi les responsables politiques.
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Elisabeth Borne, qui a maintenant la certitude de rester à Matignon a dit que le gouvernement soutiendrait « avec force » cette proposition. Pourtant, chez Les Républicains, des personnalités comme Bruno Retailleau s’y sont dit hostiles et on peut penser que ce sera la position dominante à droite. Marine Le Pen s’est contentée d’un étrange « pourquoi pas ? », sachant que son groupe est divisé sur la question. Plus surprenant, François Bayrou a également pris une position hostile à l’inscription d’un « droit à l’avortement » dans la Constitution. Il l’a d’ailleurs clairement exprimé le 26 juin sur le plateau de BFMTV. C’est important parce que Bayrou est le premier baron du macronisme et il est le patron de la deuxième composante de la majorité. Cela veut dire que ce projet qui devrait recueillir les trois cinquièmes des voix au Parlement n’a pas la garantie d’aboutir.
Dans le climat politique actuel cette initiative a un double effet de diversion
Ceux qui poussent le projet cherchent donc à faire croire que cette question constitutionnelle pourrait relancer le débat sur l’avortement en France. Comme si tous ceux qui ne jugent ni nécessaire ni prioritaire de passer par cette voie constitutionnelle étaient forcément des anti-avortement. En fait ce sont ceux, qui cherchent à importer en France le débat américain. Ils disent qu’il y a un recul aux Etats-Unis et qu’à cause de cela le droit à l’avortement est menacé en France. Dans la réalité, c’est l’inverse. D’une part toutes les évolutions législatives sans exception ont été dans le sens d’une facilitation du recours à l’IVG. On pense notamment à l’allongement du délai légal d’avortement ou encore instauration d’un délit d’entrave. D’autre part, aucune formation politique, ni LR ni Le RN, ne propose la moindre restriction législative. Même s’il y a quelques élus non favorables à l’avortement, aucun ne propose de toucher à la loi. C’est là une grosse différence avec les Etats-Unis, les pro-vie en France n’ont aucun relais politique majeur.
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De plus, dans le climat politique actuel, cette initiative prend un sens confus. En effet, sans que ce soit forcément le but recherché, cela a un double effet de diversion. Premièrement, le casse-tête du gouvernement est de trouver des majorités. Les macronistes vont avoir beau jeu de dire : on nous disait que c’était impossible, voyez on en a déjà trouvé une. Deuxièmement, une révision constitutionnelle, ça prend du temps, voire beaucoup de temps. Ce serait du temps pris sur les réformes ou sujets touchant à la vie quotidienne des Français. C’est pour cela qu’une opinion, même acquise au principe, pourrait y voir une ficelle de la part d’un exécutif qui n’arrive toujours pas à se mettre en route.
Guillaume Tabard