On se plaint souvent des retards dans les trains, mais ceux du transport aérien sont encore plus préoccupants et singulièrement en France. Très franchement, j’ai eu du mal à digérer ce chiffre, qu’on peut lire ce matin dans Les Echos. 10% de kérosène en plus, c’est ce que coûtent les retards accumulés par les avions, simplement du fait du manque de coordination entre les contrôleurs aériens en Europe.
La plateforme FlightRadar permet de suivre en temps réel la position de tous les avions de ligne en vol
En pleine chasse au gaspillage énergétique, difficile de ne pas voir ici un gisement important à exploiter. Revenons au point de départ. On se gargarise souvent de bénéficier de l’un des espaces maritimes les plus vastes au monde. C’est la même chose pour l’aérien, et en Europe, c’est nous qui avons le plus grand ciel. En revanche nous sommes aussi titulaires du record s’agissant des retards dans l’aérien – et les deux sujets sont liés. Le problème est que, qui dit retard, dit consommation, et dit pollution. On ne s’en rend pas toujours compte quand on est passager d’un avion, mais en revanche, c’est très visible sur les plateformes comme FlightRadar, qui vous permettent de suivre en temps réel la position de tous les avions de lignes en vol : on observe ces fameuses boucles dans le ciel, ces avions qui tournent sur eux-mêmes (sur quelques kilomètres évidemment vu leur vitesse), au-dessus des grands hubs aéroportuaires. Un peu crispant, tout ça, puisque ce ne sont pas des petits bateaux qui font des ronds dans l’eau, mais des colosses de 50 à 300 tonnes qui patientent avant d’atterrir.
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En moyenne, les vols moyen-courriers sont rallongés de 42 km
Pourquoi de tels retards ? D’abord le ciel européen est morcelé. Il y a un manque de coordination, chaque pays a ses propres contrôleurs aériens, et donne ses propres directives aux pilotes de ligne qui passent au-dessus de lui. Ça ne favorise pas des trajectoires ou des altitudes optimales. En moyenne, les vols moyen-courriers sont rallongés de 42 km, et on gaspille 70 kg de kérosène. Vous multipliez ça par le nombre de vols et vous arrivez à un surcoût de 350 millions d’euros pour les compagnies, et plusieurs milliers de tonnes de kérosènes brûlés en pure perte. Ensuite il y a les dysfonctionnements propres au système français. Le contrôle aérien de notre pays est responsable d’un tiers des retards de navigation. C’est une infrastructure dépassée, qu’il faudrait complètement moderniser. On manque aussi de personnel dans certains centres, nous disent Les Echos ce matin. Et puis il faudrait aussi moderniser l’organisation du travail des contrôleurs aériens. Sachant que les grèves qu’on observe assez régulièrement dans cette profession stratégique – donc dotée d’une vraie capacité de nuisance – sont responsables à elles seules de 25% des retards. Et là aussi, en Europe, nous détenons un record peu glorieux puisque les 2/3 des jours de grève du contrôle aérien sur le continent sont en France. On remarque que dans la plupart des pays, cette activité est privatisée… Difficile de l’imaginer chez nous.
François Geffrier
Ecoutez François Geffrier (à partir de 7’50)