Gaz russe : La Russie réduit ses livraisons vers l’Europe, quel impact pour la France ?

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La Russie a baissé ses livraisons de gaz vers l’Europe. L’Allemagne est principalement touchée. Dans un contexte explosif, le risque d’une pénurie de gaz pour cet hiver refait surface et incite à réfléchir aux solutions qui s’offrent à la France pour s’affranchir de l’énergie du Kremlin.

Moscou a sanctionné certaines sociétés européennes par mesure de rétorsion

La Russie a commencé à réduire ses livraisons de gaz à l’Allemagne. Les marchés s’inquiètent du risque d’une pénurie de gaz et en effet la situation est très tendue. On ne sait pas si la Russie va continuer à livrer les opposants et si l’Europe qui dépend à 40% du gaz russe aura le courage d’imposer un embargo. Il suffit donc de la moindre étincelle pour que la situation s’enflamme. Le 12 mai, Moscou a commencé à sanctionner certaines sociétés européennes par mesure de rétorsion et a réduit le débit sur certains gazoducs qui passent par l’Ukraine. Ainsi, même si l’impact en volume a été faible, qu’on est au printemps et qu’on a beaucoup moins besoin de gaz, les prix qui sont déjà 10 fois plus hauts qu’il y a un an ont encore bondi de 10%. La vraie crainte serait donc un manque de gaz pour cet hiver.

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Quelques signes montrent en effet des raisons de s’inquiéter. En temps normal, on brûle du gaz en hiver pour se chauffer ou pour faire tourner des turbines qui produisent de l’électricité. Ainsi, pour faire face au pic de la demande, on puise dans des réserves de gaz. En France, on compte 16 cavités salines dans lesquelles on peut stocker un quart de notre consommation annuelle. Donc on vide les réserves en hiver et le reste de l’année, on continue de se faire livrer du gaz pour reconstituer les stocks de précautions. Pour l’instant, tout se passait bien. On a reconstitué nos stocks à hauteur de presque 40% en Europe. Si on continue d’être livré normalement on aura une bonne marge de sécurité quand l’hiver pointera son nez. Pourtant, si la Russie ou l’Europe décide de brutalement couper le robinet, on se retrouvera dans une position très vulnérable et pendant plusieurs années.

 

Il faudrait que la France importe beaucoup plus de gaz des Etats-Unis ou du Qatar

Est-ce que cela souligne notre incapacité à se passer du gaz russe ? A court terme, on peut consommer moins. Dans les pays où il n’y a pas de bouclier tarifaire, les prix ont flambé et les consommateurs sont donc plus économes. Chez nous on pourrait relancer une chasse au gaspillage. Quand on baisse de 1 ou 2 degrés le chauffage à la maison, on peut réduire de façon sensible nos importations. On peut aussi importer un peu plus de GNL d’Asie. Comme on est prêt à payer cher, les Asiatiques nous vendent leur gaz liquéfié transporté par méthanier. Ils font tourner leurs turbines au charbon. Pourtant, pour réduire totalement notre dépendance au gaz russe, il faudrait qu’on importe beaucoup plus de gaz des Etats-Unis ou du Qatar. Le problème c’est qu’il n’est pas possible d’augmenter la production en un claquement de doigt. La quasi-totalité de la production pour les années à venir a été préachetée. Si on en veut plus, il faut que les producteurs produisent plus. C’est possible, mais il faut en amont et en aval des installations de liquéfaction et de regazéification. On parle d’outils industriels lourds, coûteux et complexes. Pour les construire, il faut 2 ou 3 ans. Cela veut dire que tant qu’on n’aura pas cette infrastructure, on ne pourra pas se passer totalement du gaz russe. On peut être indépendant un jour. On ne peut pas le devenir en un jour.

David Barroux 

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