Emploi : L’immigration économique, une solution inexploitée pour pallier le manque de main-d’œuvre

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Face au manque de personnel dans de nombreux secteurs de l’industrie française la question d’une immigration économique est à nouveau d’actualité. Cette méthode consistant à faire venir spécifiquement des travailleurs étrangers pour répondre à la demande des employeurs n’est malheureusement que trop peu utilisée à cause d’une procédure complexe et inefficace.

Seuls 36 000 titres de séjour ont été délivrés en 2021

Le 1er juin, le président du Medef a mis les pieds dans le plat. Interrogé sur la pénurie de main-d’œuvre, Geoffroy Roux de Bézieux a estimé qu’il fallait réfléchir au recours à l’immigration économique. D’autant plus que dans les années à venir la population sera de plus en plus vieillissante. Certains pays ont instauré des quotas comme les Etats-Unis ou le Canada permettant une immigration choisie en fonction des besoins économiques du pays. Ce système n’existe pas en France, pourtant il est souvent évoqué. En 2019, Edouard Philippe, quand il était Premier ministre, l’avait envisagé. Alors face à la multiplication des problèmes de recrutement, l’immigration pourrait être une solution. Karim Khan, propriétaire d’un hôtel 5 étoiles situé à côté de Rennes, recherche depuis 4 mois un cuisinier et un assistant maître d’hôtel. Il envisage comme solution, du moins temporairement, d’embaucher des salariés étrangers

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En 2019, l’UMIH, le syndicat professionnel du secteur, avait fait venir 3 Tunisiens en Bretagne : « on pourrait profiter d’une main-d’œuvre qualifiée. il y a en effet des écoles hôtelières au Maghreb qui ont un très bon niveau ». Aujourd’hui, l’immigration économique reste limitée. Seulement 1 immigré sur 5 vient pour ce motif. Seuls 36 000 titres de séjour ont été délivrés en 2021. Pourtant les procédures d’autorisation de travail ont été simplifiées assez discrètement l’an dernier. En effet le gouvernement a réactualisé la liste des métiers en tension ouverts aux immigrés. Cela concerne les carrossiers, les bouchers, les ingénieurs BTP ou les maîtres d’hôtel. Jean-Christophe Dumont, chef de la division des migrations internationales de l’OCDE explique qu’« en 2022, le recours à l’immigration de travail sera accru. La politique d’immigration de travail est en théorie très ouverte. Il n’y a pas de limite numérique ni de niveau minimum d’éducation ».

 

« Il y a une dichotomie qui existe entre l’obtention de l’autorisation de travail et celle du titre de séjour »

Malheureusement cela semble exclusivement théorique. En effet Manon Domingues Dos Santos, professeur d’économie à l’Université Gustave Eiffel et experte de l’immigration souligne que dans les faits, cela reste très compliqué, surtout pour les PME« même si cela a été simplifié en terme de coûts et de délais, cette procédure est inefficace car une dichotomie existe toujours entre l’obtention de l’autorisation de travail et celle du titre de séjour. Il faudrait instaurer un guichet unique ».  L’identification des candidats est aussi un autre frein à cette immigration économique, selon Ekrame Boubtane, économiste spécialisée dans les questions de migrations internationales : « le processus de recrutement peut être compliqué car les personnes sont dans d’autres pays. On ne sait pas dans quelles mesures le patronat à l’étranger a mis en place des organismes permettant de recruter les bons profils ». Il reste aussi la question de l’intégration sociale et économique de ces salariés. Selon cette experte, c’est aussi la responsabilité des employeurs. En cas de recrutement migratoire il faudra aider à trouver un logement ou à scolariser les enfants de ces nouveaux salariés.

Emilie Valès 

Ecoutez le reportage d’Emilie Valès :

 

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