Saisi en référé, le Tribunal administratif de Paris a suspendu le 7 décembre la sanction (exclusion d’un an) dont faisait l’objet Jérôme Pernoo, professeur contractuel de violoncelle au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris (CNSMDP), suite à des accusations de « comportements inconvenants« . Par ailleurs, le juge des référés, dans son ordonnance, a pointé le « manque d’impartialité de l’enquête administrative » menée par le cabinet mandaté et « l’irrégularité de la composition du conseil de discipline ». Vendredi le Conservatoire lui a signifié sa réintégration… avant de le suspendre à nouveau.
Un licenciement pour faute grave avait été envisagé avant que soit décidée une exclusion de 12 mois sans traitement
Les épisodes se succèdent dans le sordide feuilleton qui a débuté au printemps dernier suite au signalement de deux faits d’agression sexuelle (dont un sur mineur) de la part de Jérôme Pernoo, 49 ans, professeur contractuel de violoncelle au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris depuis 14 ans. Les faits présumés se seraient déroulés en dehors de l’institution sur plus d’une dizaine d’année (de 2002 à 2016).
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Dès qu’elle a pris connaissance de ces signalements, la direction du CNSMD avait diligenté au mois de mars une enquête interne en collaboration avec le cabinet Egaé, dirigé par la militante féministe Caroline de Haas, et suspendu Jérôme Pernoo de son poste. En avril, le Parquet de Paris décidait d’ouvrir une enquête préliminaire pour « agression sexuelle sur mineur ». Au mois de juin le conseil de discipline de l’institution préconisait un licenciement pour faute grave mais y avait renoncé et avait opté pour une exclusion de 12 mois sans traitement.
Selon Le Point, le Conservatoire a diligenté une nouvelle enquête interne avec un autre cabinet
Jérôme Pernoo et ses conseils ont contesté cette décision et ont saisi en référé le Tribunal administratif de Paris début novembre. Dans son ordonnance, rendue de 7 décembre, le juge des référés a considéré que cette sanction était disproportionnée et a donc suspendu son exécution, « jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de la décision attaquée », et que le CNSMD devra, en outre, verser 2000 euros au professeur. L’ordonnance ne remet pas en cause l’établissement de certaines « attitudes inappropriées » (surnoms à des élèves, contrepétries, bises et accolades fréquentes, proximité avec ses élèves) qui vont « au-delà du devoir d’exemplarité qui incombe à tout enseignant » mais le juge évoque notamment le « manque d’impartialité de l’enquête administrative » (51 personnes appelées à témoigner dont Jérôme Pernoo) et «l’irrégularité de la composition du conseil de discipline et de la procédure suivie devant cette instance consultative » .
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Dans un premier temps, suite à cette décision de justice, le Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris a indiqué « former les recours qui s’imposent contre cette décision du tribunal administratif de Paris » (le magazine Marianne évoque un possible recours en cassation devant le Conseil d’État) mais, même dans ce cas, la procédure n’étant pas suspensive Jérôme Pernoo devrait être réintégré. Mais nouvelle et surprenante volte-face ce vendredi. Selon Le Point, le CNSMD, dans un e-mail doublé d’une lettre recommandée a fait savoir qu’il avait décidé d’annuler sa sanction disciplinaire du 7 septembre, de réintégrer Jérôme Pernoo et de lui reverser ses 3 mois de salaire retenus… avant de le suspendre de nouveau pour 4 mois. Période pendant laquelle une seconde enquête interne, confiée à un autre cabinet, sera diligentée.
Philippe Gault