Japon : la tradition de la 9e Symphonie de Beethoven plus forte que le coronavirus

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Au Japon, depuis près de 75 ans, il est de tradition de jouer et de chanter dans tout le pays la neuvième Symphonie de Beethoven pendant les derniers jours de décembre. Malgré la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid 19, l’année 2020 n’a pas dérogé à la règle et l’Ode à la joie a résonné dans tout l’archipel nippon.

Les concerts donnés par l’Orchestre Symphonique de Tokyo joués cette année à guichets fermés

Au Japon le respect des traditions est sacré. Il n’était donc pas question, même en pleine crise sanitaire, de ne pas respecter celle qui consiste, lors des derniers jours de décembre pour les plus grands orchestres classiques comme pour les plus petites chorales locale à jouer la 9e Symphonie de Ludwig van Beethoven et chanter son Ode à la joie.

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Sur le site slippeddisc.com, le chef d’orchestre japonais Keitado Harada (responsable du Phoenix Youth Symphony et chef associé de l’Opéra de l’Arizona) explique que toutes les précautions ont été prises par les orchestres et chorales japonais concernés. Réduction du nombre de chanteurs dans les chœurs, du nombre de musiciens, notamment les cordes, et si des solistes devaient chanter sur le devant de la scène, les premiers rangs de la salle ne devaient pas être occupés par le public (alors qu’il n’y a plus de limitation de jauge de spectateurs au Japon). Un public qui lui aussi n’a pas boudé cette séquence traditionnelle. Ainsi les concerts proposés la semaine dernière par l’Orchestre Symphonique de Tokyo, dirigé par Jonathan Nott, ont été donnés à guichet fermé.

Une tradition qui remonte à 1947

Selon le catalogue de l’exposition Ludwig van. Le mythe Beethovenqu’avait proposée la Phikharmonie de Paris fin 2016, cette tradition du Jaiku ou Big nine, qui consiste à interpréter la 9Symphonie de Beethoven à l’occasion des fêtes de fin d’année à travers tout le Japon, remonte à l’après-2guerre mondiale. Plus précisément à 1947, un an après le départ du chef d’orchestre Joseph Rosenstock, qui dirigea pendant 10 ans l’Orchestre de la radio japonaise (l’actuel Orchestre symphonique de la NHK) après avoir fui l’Allemagne nazi en 1936. D’après les spécialistes, le maestro allemand avait pris l’habitude d’inscrire la 9e Symphonie de Beethoven au programme de son orchestre japonais dans les tout derniers jours de l’année.

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Depuis 73 ans donc, l’Orchestre symphonique de la NHK programme systématiquement cette œuvre à l’approche du Nouvel An (cette année dirigé par Roger Norrington) procédant même, à partir des années 1975, afin de répondre à la ferveur croissante du public, à 4 ou 5 concerts invariablement donnés entre le 22 et le 27 décembre, à guichets fermés, dans une salle de trois mille places. Un engouement qui déborda sur la plupart des associations orchestrales du pays. Le sommet de la vague se situe au tournant des années 1990 : les 9 formations symphoniques professionnelles que comptait à cette époque Tokyo donnaient alors une cinquantaine d’exécutions de la Neuvième, et de gigantesques concerts, mettant à contribution entre cinq mille et dix mille choristes, sont, depuis, organisés annuellement notamment dans des palais des sports à Tokyo et à Osaka. Des « associations pour chanter la Neuvième » (« daiku wo tau kai »), ont même été créées, n’ayant d’autre raison d’être que l’exécution de cet unique morceau, se réunissant à partir de l’été pour préparer, sous la direction d’un maître de musique local, le concert de fin d’année, souvent accompagnées par l’orchestre symphonique professionnel de région.

Philippe Gault

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