Elisabeth Roudinesco était l’invitée politique de la matinale de Guillaume Durand ce mercredi 10 mars. La psychanalyste et universitaire a dénoncé les « dérives identitaires de nos sociétés » et s’est exprimée sur la polémique entourant la famille royale britannique.
Elisabeth Roudinesco : « Le terme d’islamo-gauchisme est une construction »
Elisabeth Roudinesco estime que Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, a eu tort de dénoncer une emprise de l’islamo-gauchisme dans les universités françaises. Selon la psychanalyste, « ce terme est une construction ». Frédérique Vidal a donc fait le contraire de ce qu’elle aurait dû faire, c’est à dire appeler à « un peu de sérénité au lieu d’exciter les individus les uns contre les autres ». Elisabeth Roudinesco reconnaît cependant que « les études de genres et décolonialistes existent en université, c’est un problème. Mais ces études restent minoritaires et il est parfaitement inexact de dire qu’elles ont envahi la totalité des études sociologiques (…) dire qu’on ne peut plus rien enseigner est faux ». Elle cite d’ailleurs en exemple l’Ecole Normale Supérieure où elle enseigne qui « n’est pas un foyer d’islamistes fous ». Elisabeth Roudinesco remet également en cause le caractère particulier de l’intervention de Frédérique Vidal : « c’est la première fois qu’une ministre intervient pour examiner l’enseignement (…) cette affaire devient d’une totale stupidité ».
A lire aussi
Elisabeth Roudinesco admet également une « dérive identitaire » dont elle date le début « à la chute du mur de Berlin et la fin des approches marxistes entraînant un effondrement politique et intellectuel (…) les engagements binaires se sont transformés en multiples revendications sociétales qui sont devenues identitaires ». Plus de pensée Marxiste aurait donc, selon elle, prévenu la société des maux d’aujourd’hui et de dérives « assignant chacun à sa couleur de peau, à son sexe, à son angoisse, à son physique ».
Elisabeth Roudinesco : « La dynastie anglaise a toujours été marquée par la tragédie, le drame ou la farce »
Elisabeth Roudinesco met en exergue ce qu’elle considère comme un paradoxe « les dérives identitaires sont inspirées des meilleurs penseurs : Sartre, Derrida, Foucault (…) des auteurs qui sont dans la Pléiade et traduits dans le monde entier (…) qui sont aujourd’hui brocardés par des réinterprétations de leurs œuvres que je n’accepte pas ». Lorsque les indigènes de la République « écrivent qu’il faut fusiller Sartre », Elisabeth Roudinesco y voit « une dérive identitaire contestant l’existence d’un anti-colonialisme français ».
A lire aussi
Interrogée par Guillaume Durand à propos de la polémique opposant Meghan Markle et le Prince Harry face au reste de la famille royale, Elisabeth Roudinesco décrit une farce Shakespearienne : « la dynastie anglaise a toujours été marquée par la tragédie, le drame ou la farce. Ce qui est frappant dans cette histoire, c’est que le Prince Harry a voulu faire échapper son épouse au destin de sa mère, le destin tragique de Diana (…) Il répète ainsi sous forme de farce une tragédie, celle de sa mère ». L’universitaire pousse un peu plus loin la psychanalyse de la famille royale en qualifiant la réponse d’Elisabeth II de « Lacanienne », une réponse très politique face aux accusations de Meghan Markle et du Prince Harry de racisme concernant la couleur de peau de leur fils Archie.
Rémi Monti