La couverture, un tableau du peintre contemporain Pierre-Yves Russo, laisse deviner, plus encore que le titre, le programme. Marquée par les vanités hollandaises, cette image de chandelle qui se consume rappelle bien évidemment la fugacité de l’existence humaine. Aussi ces airs de dévotion domestique reposent-ils sur des poèmes essentiellement pénitentiels. Du pain béni, ose-t-on écrire, pour Purcell dont le génie s’est exprimé avec une rare intensité dans la musique vocale, tant profane que sacrée : il restitue en effet ce climat douloureux par des tourments chromatiques et des tensions harmoniques saisissants.
Encore peu connu malgré quelques anthologies (Paul McCreesh, Archiv ; Christophe Rousset, Aparté) et l’intégrale signée Robert King (Hyperion), ce répertoire atteint pourtant une profondeur expressive digne des pages les plus fameuses du compositeur malgré un effectif limité à une ou plusieurs voix soutenues par la basse continue.
Dès les premières notes de " Here me, O Lord, the great support ", les musiciens de La Rêveuse associent l’auditeur à leur prière fervente où se mêlent la crainte et l’espoir. L’humeur se fait nettement plus grave dans " O, I’m sick with life ! " où le silence mène au seuil de l’obscurité éternelle. D’une page à l’autre, les trois chanteurs, les ténors Jeffrey Thompson et Marc Mauillon et la basse Geoffroy Buffière, n’hésitent pas à souligner les contrastes et à s’engager sans réserve dans ce théâtre sacré, encouragés par un continuo exemplaire et convaincu. Le verbe haut et le ton volontiers déclamatoire, ils ont bien com pris que l’intensité des couleurs et la volupté de l’expression pouvaient véhiculer les sentiments les plus intimes. Comme la peinture caravagesque judicieusement choisie pour la couverture.
LE TEMPS D’UNE CHANDELLE
Radio Classique
Un répertoire pour une ou plusieurs voix encore peu connu et digne des plus grandes compositions de Purcell. Sur la fugacité de l'existence humaine.