Les conclusions d’un rapport commandé à une commission d’historiens, publié le 8 juin, indiquent que, parmi les personnalités ayant donné leur nom à des rues ou places de Salzbourg, un certain nombre a été plus ou moins impliqué avec le régime nazi. Dans cette liste, 13 noms considérés comme ayant eu des « connexions sérieuses », dont celui du célèbre chef d’orchestre Herbert von Karajan qui a donné son nom à une place de la ville autrichienne.
La commission a étudié le cas de 66 personnalités en rapport avec le régime nazi
Dans son rapport, la commission qui réunissait, à la demande de la municipalité de Salzbourg, 9 éminents historiens, indique avoir étudié le cas de 66 personnalités ayant eu rapport avec le régime nazi et dont des rues ou places de la ville portent le nom. Parmi ces noms, dont un certain nombre de musiciens réputés, 24 ont été placés en catégorie 1 (leur faible implication ne nécessite pas qu’elle soit indiquée), 29 en catégorie 2 (leur relative proximité avec le régime nazi implique notamment qu’elle soit mentionnée sur les plaques portant leur nom) et 13 dans la catégorie 3 (Leur implication « sérieuse » avec le régime nazi pourrait conduire au retrait de leur nom des endroits concernés).
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Si le compositeur Carl Orff (Carmina Burana) a été classé en catégorie 1 et le chef d’orchestre et compositeur Wilhelm Furtwängler en catégorie 2, quatre autres grands noms de la musique autrichienne ont été placés dans la catégorie 3, celle du déshonneur. C’est le cas pour Heinrich Damisch (co-fondateur du Festival de Salzbourg), Hans Pfitzner (compositeur et chef d’orchestre), Franz Sauer (organiste de la cathédrale et professeur du Mozarteum), Erich Schrenk (musicologue) et surtout Herbert von Karajan, même si, pour le maestro originaire de Salzbourg, 4 des 9 membres de la commission ont voté pour un classement dans la catégorie 2.
Herbert von Karajan n’a jamais exprimé ni remords ni regrets à l’égard de cette période de sa vie
Il est vrai qu’Herbert von Karajan a toujours affirmé que son implication avec le régime nazi lui avait était dictée non par conviction mais pour favoriser ses ambitions professionnelles. Installé en Allemagne à Ulm au début des années 30, le chef autrichien avait en effet fait une 1ère demande d’adhésion au parti nazi en 1933 suite à l’accession d’Adolf Hitler à la chancellerie. Demande rejetée, puis acceptée 2 ans plus tard alors qu’il vient d’être nommé à la tête de l’orchestre du Théâtre d’Aix-la-Chapelle puis de faire ses débuts au Philharmonique et au Staatsoper de Berlin qui lui permettent de devenir un chef d’orchestre réputé et très demandé en Allemagne. En 1947, même si devant le tribunal de dénazification autrichien ses détracteurs ont insisté sur le fait qu’il aurait adhéré aux thèses antisémites, racistes et xénophobes du futur führer dès ses études, Herbert von Karajan fut acquitté. Jusqu’à sa mort en 1989, le maestro n’exprimera jamais ni remords ni regrets à l’égard de cette période de sa vie.
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Les recommandations de la commission doivent désormais faire l’objet d’un vote (à l’automne) auprès des habitants de Salzbourg. D’ores et déjà les sympathisants du FPÖ (parti nationaliste) ont annoncé qu’ils s’opposeront à tout changement de nom et, même si elle estime que « ne rien faire du tout serait inconcevable », la municipalité de Salzbourg (SPÖ, parti socialiste) s’attend à ce que ces recommandations soient majoritairement rejetées.
Philippe Gault