Gérald Darmanin s’est expliqué hier soir sur les incidents au Stade de France, c’était nécessaire et même urgent. Mais il n’est pas sûr que ces explications soient suffisantes compte tenu du choc des images de samedi et du caractère décalé des premières justifications gouvernementales.
Y a-t-il eu faute de communication de Gérald Darmanin ?
La thèse, on s’en souvient, était de faire porter la faute aux supporters anglais venus avec des faux billets. Ce qui est vrai, et dans des proportions hallucinantes, 30 ou 40 000 faux billets. Et c’est ce que Gérard Darmanin a rappelé au 20 heures de TF1. Mais ce qu’on a vu, ce que des dizaines de millions de téléspectateurs ont vu, ce sont des hordes de voyous débarqués des quartiers de Seine-Saint-Denis profitant de la pagaille pour voler et casser, autrement dit, ce n’était pas uniquement un problème de billetterie mais un problème d’ordre public. Ceux qui ont été placé en garde à vue après avoir été interpellés n’étaient que très marginalement Anglais.
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Peut-on pour autant parler de faute du ministre de l’Intérieur ? On peut parler à tout le moins d’une faute de communication. Commencer par renvoyer la seule responsabilité sur les Anglais puis, comme l’a fait la ministre des Sports ou le Préfet de police, sur l’UEFA, organisatrice du match, ça a eu un petit côté « c’est pas nous, c’est les autres » qui n’est jamais très glorieux. Ensuite, s’agissant de Gérald Darmanin, en tant que ministre de l’Intérieur il aurait dû en premier parler des désordres d’ordre public et il aurait dû être le premier à le faire. J’ajoute qu’il s’honore d’être le pilier droit du gouvernement et sa mission est de border le président de la République sur son flanc régalien, celui sur lequel il est le plus fréquemment critiqué par la droite et par le Rassemblement National. Quitte à être dans une posture, on l’aurait attendu plus tôt dans celui de défenseur de l’ordre face aux racailles.
La stratégie d’Emmanuel Macron est d’éviter toute prise de risque
Cet épisode peut-il coûter cher au gouvernement sur le plan politique et électoral ? Ce n’est pas Mélenchon qui peut en profiter alors que c’est l’adversaire le plus redoutable pour la majorité, mais cet épisode recèle une leçon politique. On voit bien que depuis la présidentielle et jusqu’au lendemain au moins des législatives, la stratégie d’Emmanuel Macron est d’éviter toute prise de risque. La leçon, c’est qu’un gouvernement peut renoncer à agir mais il ne peut pas échapper à la nécessité de réagir à l’imprévu. Et il est d’autant plus rattrapé par une actualité qu’il ne maîtrise pas, qu’il ne réussit pas à imposer une actualité qu’il choisit.
Guillaume Tabard